Hal Lindes a posté récemment des photos de sa Stratocaster noire jouée par Mark Knopfler sur ‘Portobello Belle’ durant la tournée ‘Love over gold’ de Dire Straits en 1983. Explications.

Il y a 4 jours, Hal Lindes (second guitariste de Dire Straits entre 1980 et 1984) a posté sur son compte Facebook la photo de cette guitare : une Stratocaster modèle Reissue 57 (donc forcément avec un manche érable une pièce). Sa finition noire la rend très proche de la célèbre Blackie de Clapton (qui était elle composée d’un manche de 57 et un corps de 56). Mais celle-ci est identifiée comme étant la « Stratocaster de Portobello Belle« .

En effet, cette guitare était utilisée par Mark Knopfler sur le morceau Portobello Belle durant la tournée Love over gold en 1983. Hal Lindes avait d’ailleurs publié la veille une photo de Mark avec cette guitare. Il faut noter que mark jouait Portobello Belle sur cette Strat uniquement à partir du mois de mars 83, car auparavant depuis le début de la tournée à l’automne 82, il jouait ce morceau sur la guitare National.

Pourquoi Mark empruntait-il une guitare à Hal au lieu de jouer sur une des siennes ? Une des raisons pourrait-être l’accordage spécifique. Sur cette tournée, Portobello Belle est en Sib (la version studio en en Do, et sur la tournée 80-81 le morceau est en Ré), et Mark la joue en position d’ Open Tuning de Sol (car sans doute composée sur la guitare National, guitare utilisée sur la version studio). D’où le capo en troisième case. Il est amusant de noter qu’il est toujours en place, comme si la guitare n’avait jamais été touchée depuis plus de 40 ans et qu’Hal l’aurait conservée telle quelle après la fin de la tournée et le mythique concert d’Alchemy. On remarque aussi que les vis centrales du chevalet ont été enlevées en ne laissant que les deux aux extrémités, comme sur les modèles plus récents de Stratocasters (la mienne par exemple).

► En 2016, Ingo Raven avait déjà publié un article au sujet de cette guitare.

Mais il était plutôt rare de voir des images de Mark Knopfler avec cette guitare, et encore plus rare de voir cette guitare de près. Hal Lindes nous offre donc une véritable pépite avec sa publication. Et cette guitare revêt pour moi uen consonnance particulière, car la version de Portobello Belle durant cette tournée de 1982-83 est à mon gout un des summums musicaux de Dire Straits, alors à son apogée. Pour pouvoir l’écouter et l’apprécier en intégralité, il a fallu s’armer de patience et passer par plusieurs étapes :

1. En 1988, la compilation Money for nothing nous offre un enregistrement du 20 juin 1983 à Paris, mais dans une version écourtée, autour des 4 minutes :

2. En 2006, je découvre l’enregistrement intégral sur un bootleg. Un peu plus tard, je trouve sur YouTube un mix des deux qui regroupe la source audience (intro + outro) avec l’officiel (chanson) issu de la compilation, donnant ainsi la version complète du 20 juin :

3. En 2022, Money for nothing est réédité en double vinyle et inclut cette fois l’enregistrement du 22 juillet 1983, également écourtée, toujours autour des 4 minutes :

4. En 2023, le coffret Dire Straits Live 1978-1992 propose une version complète d’Alchemy incluant Portobello Belle (du 22 juillet)… mais Guy Fletcher choisit de ne pas garder l’outro pourtant fabuleuse à mon goût, avec notamment le duo guitare-saxophone entre Mark Knopfler et Mel Collins, ce qui donne une version d’un peu plus de 7 minutes (intitulée « Extended Intro », en regard de la version qui figurait auparavant sur la compilation Money for nothing) :

5. Rapidement après la sortie du coffret, une version YouTube mixe l’officiel (intro + chanson) avec l’outro provenant d’un bootleg, donnant ainsi la version complète du 22 juillet :

Le mélange des styles musicaux (reggae, calypso, mélodie irlandaise, chanson pop…), le dialogue entre la guitare de Mark Knopfler et le saxo de Mel Collins, la montée sur le final, et la présentation de chaque musicien qui s’arrête de jouer chacun à son tour après avoir été cité… avant de s’enchainer avec un intermède musical qui introduit Tunnel of love… tous ces éléments font de Portobello Belle durant cette tournée un moment épique et un des points d’orgue des concerts. Le tout joué sur une guitare unique dont Hal Lindes nous a récemment révélé qu’elle lui appartenait. 40 ans après, on continue encore d’en apprendre sur cette période qui constitue à mon sens l’apogée de Dire Straits.

© Jean-François Convert – Septembre 2024