Il y a 30 ans sortait l’album ‘Blues’ de Jimi Hendrix

Le 26 avril 1994 arrivait dans les bacs ‘Blues’, le dernier disque posthume de Jimi Hendrix produit par Alan Douglas, avant que le catalogue du divin gaucher ne soit repris en main par sa famille l’année suivante.

Pendant deux décennies (de 1974 à 1995) le producteur Alan Douglas a géré l’héritage musical de Jimi Hendrix, de façon très discutable. Il a éparpillé les chutes de studio du divin gaucher sur divers disques sans réelle logique, a parfois rajouté des overdubs ultérieurs par des musiciens de studio… et n’a pas forcément rendu justice à l’œuvre du guitariste. Tout ceci sera rectifié lorsque la famille Hendrix, et notamment la demi-sœur, reprendra les affaires en main à partir de 1995.

Mais juste avant cette passation de pouvoir sort un ultime album produit par Douglas qui pour le coup est à saluer : Blues qui arrive dans les bacs en avril 1994 regroupe 11 titres liés par une thématique évidente, et pour la plupart inédits à l’époque. Le morceau d’ouverture avait déjà été toutefois vu dans des documentaires. Il s’agit de Jimi jouant Hear my train comin’, seul à la guitare acoustique douze cordes, un peu à la manière de Leadbelly. Le guitariste habitué au déluge électrique noyé dans du larsen se positionne ici en véritable héritier du deep south delta :

Il a toujours été évident qu’une des principales influences de Jimi Hendrix était le blues. Mais aucun disque auparavant ne l’avait à ce point synthétisé. Que ce soit à travers des reprises de standards ou des compositions personnelles, le gaucher montre ici toute l’étendue du blues dans son jeu. Avec la Flying V rauque dans Born under a bad sign (d’Albert King, lui aussi gaucher et jouant lui aussi sur Flying V… mais avec les cordes inversées), la Höfner Club 50 crunchy sur Red House ou la Stratocaster incandescente sur la version live de Hear my train comin’, Jimi pousse le blues dans ses retranchements lui donnant une autre dimension.


 « Bien sûr que Jimi Hendrix jouait le blues du delta…
sauf que ce delta se trouvait sur Mars »

Magazine Rolling Stone

Si Red House , Once I had a woman ou Bleeding Heart respectent le classique douze mesures, la plupart des morceaux sortent des sentiers battus. L’interprétation de Mannish Boy s’éloigne carrément de l’original, et Hear my train comin’ en concert flirte ostensiblement avec les prémices de ce qu’on n’appelait pas encore le jazz-fusion. Cette version figurait déjà dans le B.O. du film Rainbow Bridge :

De même que Red House est la version studio de l’album Are you experienced ? En revanche, Voodoo Chile Blues est une prise alternative, différente de celle qu’on trouve sur Electric Ladyland. Idem pour Catfish Blues qu’on avait déjà entendu sur Radio One en 1988, ici c’est une autre version, enregistrée en Hollande en décembre 1967. A ce titre, le livret est très complet et fournit toutes les informations des sessions dont sont issues les morceaux.

L’iconographie est stylisée en représentant le visage de Jimi à Woodstock rempli des plus grandes figures du blues. Et plusieurs photos affichent le divin gaucher avec d’autres guitares que sa fidèle Stratocaster : SG, Les Paul ou Flying V.

Quant à l’image intérieure du boitier du CD, elle le montre en train de jouer du slide de façon peu académique, mais finalement en revenant aux sources des premiers bluesmen qui utilisaient ce qu’ils avaient sous la main. Si on ajoute l’harmonica présent sur Once I had a woman ou le piano sur Jelly 292, cela démontre l’attachement de Jimi au blues traditionnel et sa volonté de lui rendre un hommage appuyé.

Ce n’était pas une surprise, on savait le lourd tribut qu’Hendrix devait au blues. Mais ce disque l’a cristallisé de façon intelligente, documentée et didactique avec ses notes informatives et ses trésors ressortis des tiroirs. Alan Douglas terminait son travail bien mieux qu’il ne l’avait commencé. L’album Blues serait plus tard réédité sous l’égide Experience Hendrix LLC qui continue encore aujourd’hui d’exhumer des pépites du répertoire hendrixien, en les classant toujours respectueusement au regard de l’œuvre du divin gaucher. Une philosophie qui a peut-être pris sa source dans cette compilation, sortie il y a tout juste 30 ans.

© Jean-François Convert – Avril 2024

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