Un panel de différents albums et singles en langue française, tous styles confondus, sortis au cours des douze derniers mois, ou en prévision pour les prochaines semaines.












Sommaire
Stéphane Portelli : Une Ronde Vertueuse – 2024
J’ai découvert Stéphane Portelli en 2018 avec son quatrième album Sur le fil. Plus tard j’ai eu l’occasion de l’interviewer pour franceinfo, au moment de la sortie de son cinquième disque La boutique des fous en 2021. Avec ce nouvel opus Une Ronde Vertueuse il poursuit dans sa formule mêlant paroles poétiques sur une musique blues-rock inspirée des grandes références anglo-saxonnes.
On rentre dans le vif du sujet dès le titre d’ouverture où il est « question de rythme ». Cette couleur rock domine l’album avec La villa mon rêve, le morceau-titre, le véloce Dis-moi, mais on trouve aussi du groove dans le bien nommé Funky, ou encore des sonorités knopfleriennes (Stéphane est lui aussi un grand admirateur du guitariste de Dire Straits), dans Comme dans un film et Juste après. Sur cette dernière chanson qui referme le disque, Stéphane invite son fils Enzo à la batterie.
J’aime beaucoup les ambiances blues-rock bien sûr, mais je dois avouer avoir un petit faible pour le triptyque suivant : la ballade jazzy sensuelle Restons amis avec sa guitare feutrée, le rythme chaloupé de Voyage Bahia et son petit côté santanesque, et enfin le petit bijou mélodique qu’est Paradis perdu. La voix parfois aérienne de Stéphane, les superbes couleurs sonores d’une Strato cristalline et d’un dobro en slide pour un moment nostalgique illustré par le très beau clip de Vincent Cerdá (ScopandFolk TV).
Même si l’album est sorti l’année dernière, il est toujours temps de le découvrir, et de rester à l’affût des prochaines dates de concert de Stéphane Portelli :

Rod Barthet : Le phare des infortunes – 7 février 2025
Dans le sillage de Paul Personne, Bill Deraime, Louis Bertignac ou Patrick Verbeke, Rod Barthet perpétue la tradition du blues-rock à la française. Après Ascendant Johnny Cash en 2019 et A L’Ombre Des Sycomores en 2023, ce 12ème album Le phare des infortunes apparait encore plus maitrisé avec la participation d’invités prestigieux : les guitaristes Neal Black, Fred Chapellier, Eric Sauviat qui ont co-composé les musiques sur des textes co-écrits avec l’auteur Joseph D’anvers.
L’ambiance globale très rock et enjouée de la plupart des morceaux laisse parfois place à une atmosphère plus blues-roots (Et si c’était après, L’argent) ou au contraire crépusculaire (le morceau-titre, Naufragé Insulaire, et surtout le superbe Devenir vos larmes Madame).
Rod Barthet a célébré la sortie de son album au New New Morning en mai dernier avec ses amis guitaristes.
Boule : Vide son sac en public – 24 mai 2025
J’ai découvert Boule en 2019 avec A.V.I.O.N. : Appareil Volant Imitant L’Oiseau Naturel. Des textes à l’humour caustique, des mélodies accrocheuses, et un attrait de l’artiste pour la guitare, forcément ça ne pouvait que me plaire. En concert, Boule, de son vrai nom Cédrik Boulard, alterne chansons, mini-sketchs, anecdotes… et le public ne boude pas son plaisir. Il fallait bien un album live pour restituer ces moments jouissifs. c’est le cas avec Boule Vide Son Sac En Public, enregistré le 18 octobre 2024 au Trianon Transatlantique de Sotteville-lès-Rouen.
En plus du chant, Boule assure la guitare (acoustique ou électrique) et le banjo, tandis Fabrice Lhomme, Sonia Rekis et Freddy Holleville l’accompagnent respectivement à la contrebasse, à l’accordéon, et aux percussions. Les arrangements entre musette, folk et couleurs musiques du monde, servent le propos qu’il soit empreint de poésie ou d’humour au vitriol. Les paroles fourmillent de saillies sarcastiques, même quand on croit commencer sur un texte tendre comme L’ours polaire, dont le passage musical contient la mélodie sifflée de la B.O. de Coup de tête de Pierre Bachelet.
Ange : Cunégonde – 19 septembre 2025
Comme il me le disait en interview en début d’année, Christian Décamps laisse la place à son fils Tristan au sein du groupe Ange après 55 ans de carrière. Mais s’il abandonne les tournées, il continue néanmoins d’écrire, composer et chanter en studio. On l’entend ainsi sur le dernier opus Cunégonde sorti le mois dernier. Neuf titres qui restent entièrement dans l’esprit du groupe : des textes entre ésotérisme et divagations poétiques, des arrangements ou le lyrisme et l’emphase rivalisent de concert, et la voix de Tristan qui marche dans les pas de celle de son père, mais avec des intonations plus aigues, un peu comme lorsque Phil Collins avait pris la suite de Peter Gabriel. C’est le cas par exemple dans le mystique Pace nobilis.
Comme souvent chez Ange, les paroles peuvent parfois paraitres obscures. Le morceau Ennio m’a interpelé pour ses allusions au maestro Morricone, assorties de quelques clins d’œil aux films de Leone, mais ce titre semble un peu être l’outsider du disque qui globalement tourne autour de légendes, de rêves, de fantastique… Du propre aveu de Christian Décamps, Cunégonde est un album tourné vers l’imaginaire. Il explique : “Ici, Cunégonde est une déesse païenne vouée à disparaître, mais qui ne peut le faire sans son propre consentement… On la devine, on la suppose, mais elle-même n’existe pas. Jusqu’à maintenant, personne n’a pu sauver le monde… Saura-t-elle le faire ? Rien ne se mesure. Tout se ressent…”
Depuis le 4 octobre, Ange a entamé sa tournée intitulée Quitter la Meute !
Savanah : Céleste – 7 février 2025
Produit par H-Burns, l’EP Céleste de la jeune chanteuse Savanah offre 6 titres baignant dans une pop douce et planante. Atmosphère mélancolique, voix diaphane, arrangements délicats, on se laisse bercer par cet univers qui rappelle Lana Del Rey ou Beach House. Pour ma part j’ai surtout été séduit par le single Ce n’était pas moi sorti en juin. Il s’agit de l’adaptation française de It Ain’t Me Babe de Dylan, une version traduite par Hugues Aufray. L’interprétation de Savanah est très touchante et donne une relecture lumineuse et personnelle de ce grand classique.
Savanah a sorti ces jours-ci un nouveau single Je ne rêve plus, disponible tout comme son EP Céleste.
Lucien Chéenne : Larmes au Poing – 10 avril 2025
Depuis ses débuts aux accents punks et alternatifs, et sur les centaines de scènes qu’il a foulées, Lucien Chéenne leur a forgé ce caractère. L’auteur-compositeur-interprète évoque dans ses chansons les âmes cabossées, la force de l’amour, sa silhouette franche, les filles, la séparation, son job d’éduc-spé au côté des plus fragiles ou encore son fils… Ses textes montrent que c’est dans le quotidien que se cache la beauté de nos vies, et une source d’inspiration infinie. Le très beau single Derrière L’amour est une véritable déclaration d’amour d’un fils à son père, et le clip témoigne du moment très touchant où ce dernier a découvert la chanson :.
Larmes au Poing est clairement ancré dans la chanson française actuelle même si l’ambiance est volontairement typée 70’s, entre folk, rock, et psychédélisme. Des chansons sombres mais bien vivantes, pleines de poésie, héritière des grandes heures du rock romantique et atmosphérique français.

Floo Flash : Rose bonbon – 5 septembre 2025
C’est le comeback d’un groupe culte de la scène power pop française des eighties, qui avait assuré les premières parties
de groupes internationaux tels que R.E.M. et U2 : Floo Flash emmené par le guitariste Hervé Paul qui après la séparation du groupe avait poursuivi une carrière solo. Lorsqu’il a retrouvé une cassette oubliée datant de 1985 et issue des ultimes répétitions du groupe, l’idée d’une reformation s’est imposée.
Quatre décennies plus tard, on sent toujours le même enthousiasme, la même énergie, la même envie. L’influence du rock britannique est évidente avec ses guitares qui sonnent comme les références du genre, des mélodies accrocheuses, et une production qui mêle habilement influences vintage et vision contemporaine.
Retour en beauté pour cette rentrée musicale, avec le single Nos idoles à la pochette signée Kent (le chanteur lyonnais de Starshooter, autre grand groupe de la scène rock française des eighties) et l’EP 5 titres Rose bonbon.


Magali Michaut : Ma bulle – 23 mai 2025
Un parcours atypique pour cette chercheuse en bioinformatique qui compose, écrit et interprète un répertoire de chansons françaises et ballades folk. Après un premier album, Impressionniste, en 2022, Les textes abordent les transformations des relations humaines dans notre monde actuel (le morceau titre), les conséquences de l’accélération technologique de notre société (jolie métaphores dans Où va-t-on), mais aussi les souvenirs personnels dans Cergy ou le très touchant Reste avec moi qui évoque les relations père-fille :
La production offre des arrangements ciselés, mais sur la route, Magali Michaut défend ses chansons seule en scène.
Arman Méliès : Ambrosia – 7 mars 2025
Après Laurel Canyon en 2021 et Obaké en 2023 Arman Méliès poursuit en 2025 son écriture mélancolique et crépusculaire dans Ambrosia. Dès l’ouverture le soleil en soi nous plonge dans cette ambiance prenante. Des rythmes lents, des paroles entre onirisme et introspection, et cette voix toujours habitée. Le deuxième morceau de l’album est sorti en single avec un clip réalisé par Gaspard Royant. Une sorte de docu-fiction qui met en scène un sosie de Johnny sillonnant la France, avec Arman dans le rôle de son secrétaire, homme à tout faire, qui l’accompagne en toute occasion :
Ambrosia a fait l’unanimité dans la presse musicale. Encore une belle réussite pour Arman Méliès.
Paul Galiana : De la vie – 27 novembre 2024
Le guitariste et chanteur Paul Galiana marque la chanson française depuis plusieurs années. Il a sorti le 27 novembre 2024 l’album De La Vie, riche de 14 titres où se posent sa guitare flamboyante et sa voix chaleureuse. Electrique, acoustique, ou dobro, la guitare est reine, parfois assaisonnée de clavier (rhodes, piano, orgue). Si l’album s’appelle De La Vie, c’est parce qu’il parle de la vie des gens, la vie des villes. Il est pour une large part d’origine autobiographique : un disque qui part de l’intime et de l’observation du monde pour embrasser l’universel. Clément Verzi est invité sur le single Nous défendrons l’automne :
Un album dans le sillage des grands noms du rock français.
Melissmell : Olympe – 17 octobre 2025
Olympe de Gouge est une figue historique de la lutte pour les droits des femmes et même des êtres humains sans distinction de genre. Olympe est donc un titre tout naturel pour un album qui reflète les combats personnels et engagements sociaux de l’autrice-compositrice-interprète Melissmell. Depuis plus de 20 ans, cette chanteuse est toujours restée une combattante, dans sa vie de femme, de mère et de militante. Et ce nouvel album ne déroge pas au style qui a façonné sa carrière et lui a permis de conserver un public fidèle. Un disque rock, fort et poignant.
En écoutant ce disque, j’ai pensé à Colette Magny. Bravo et merci à Melissmell de perpétuer un discours et une voix qui n’ont malheureusement pas forcément tribune dans les media grand public.
Marie Espinosa – La Pleureuse – 3 octobre 2025
Très belle chanson en mode guitare-voix que La pleureuse. La voix douce et émotive de Marie Espinosa vole au dessus d’arpèges acoustiques qui passent parfois par le degré six en majeur, une couleur harmonique pas si fréquente dans le style folk-pop cher à la chanteuse. La photographie noir et blanc du clip filmé dans une chapelle s’accorde parfaitement avec l’ambiance du texte et de la mélodie.
Après un album La Démarrante en 2009, Marie Espinosa signe son retour avec ce single qui annonce un EP à sortir au printemps prochain.

© Jean-François Convert – Octobre 2025