Le 3 juillet 1971, le chanteur des Doors était retrouvé mort dans son appartement à Paris.
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Le mystère Morrison
Que dire qui n’a déjà été dit sur Jim Morrison ? Un demi-siècle après, les circonstances de sa mort continuent d’alimenter les fantasmes les plus fous. Bill Siddons, le manager des Doors n’a pu constaté que le 6 juillet la mort du chanteur, retrouvé sans vie dans la baignoire du petit appartement qu’il occupait au troisième étage du 17-19, rue Beautreillis (4e arrondissement de Paris). Aucune autopsie ni examen n’ont été pratiqués sur le cadavre, la cause officielle du décès étant une simple crise cardiaque. Nombre de théories ont émergé depuis, du suicide prémédité, à l’overdose, en passant par les thèses complotistes accusant la CIA.
Il faut dire qu’à l’instar d’un Lennon ou de ses compagnons du club des 27, Hendrix et Joplin, Jim Morrison dérangeait. Donc rien d’étonnant à ce que ses allées et venues pouvaient être surveillées de près ou de loin. Mais pas plus que je ne crois à l’assassinat de Coluche ou d’autres, je ne pense pas que Morrison ait été victime de quelque organisation obscure ou d’opération menée par des services secrets. En revanche, aussi bien pour l’un que pour l’autre, il est évident que leur message n’était pas au goût des dirigeants.
Un message d’insurrection
Comme le rappelait Jean-Patrick Capdevielle dans un documentaire, la différence de Morrison avec Hendrix et Joplin est qu’il pouvait appeler à l’insurrection. Jimi était noir, donc le gouvernement minimisait la portée de son influence, et Janis était une femme, donc tout autant méprisée de l’establishment. Mais Jim était blanc, issu d’une bonne famille et son message ne se cantonnait pas à un prêche hippie et fraternel comme les deux autres. Morrison disait en substance : « on veut le monde et on le veut maintenant ! »
Un cri lancé à la face du monde bien pensant et puritain, qui ne pouvait que séduire la jeunesse des sixties. Bob Dylan et Joan Baez prônaient l’égalité des droits et le pacifisme. Jimi Hendrix chantait le pouvoir de l’amour au-dessus de l’amour du pouvoir, Janis Joplin poussait les femmes à s’affirmer, mais Jim Morrison allait plus loin : il donnait des ailes aux ados des années 60 et leur suggérait à demi-mot de renverser l’ordre établi. Et sur l’album suivant Waiting for the sun en 1968, le chanteur appelle à la révolte de façon à peine déguisée avec Five to one :
Un poète et un chanteur
Mais il serait dommage de réduire Morrison à un trublion sulfureux et provocateur. On ne retient souvent qu’une fausse image d’un chanteur de rock qui aurait accumulé les frasques insolentes et exhibitionnistes, la plupart du temps sur de fausses accusations (le fameux incident de Miami en 1968). Au delà de son image de Rockstar politiquement incorrecte, Jim Morrison était surtout un poète qui est venu à la musique presque par hasard. En témoignent ses nombreux écrits qui n’ont pas été adaptés en chansons (et dont beaucoup d’inédits vont paraitre dans le prochain livre prévu le 7 octobre). De même que lorsqu’il a commencé à se désintéresser d’enregistrer des albums en 1968-1969, ou lorsqu’il est parti à Paris en 1971 pour se recentrer sur l’écriture et la littérature.
Néanmoins quelle perte cela aurait été si on avait dû se passer de sa voix de baryton. Lui se voyait d’abord auteur, mais il était aussi un sacré chanteur. A l’aise aussi bien dans le registre romantique-mélancolique, rock rageur, ou blues profond, il savait très souvent nous donner le frisson avec ses intonations d’outre-tombe, ou au contraire légères comme le vent. Pour quelqu’un qui ne connaissait rien à la musique, il avait un phrasé et un sens inné de la mélodie. Un trait de sa personnalité très bien retranscrit dans cette séquence du film d’Oliver Stone, lorsque Jim (Val Kilmer) chante pour la première fois Moonlight drive à Ray Manzarek (Kyle MacLachlan) :
Bien évidemment, ses textes n’auraient jamais connu cette félicité s’ils ‘n’avaient pas été mis en musiques par ces trois musiciens extraordinaires qui constituaient ce groupe mythique qu’était les Doors. Ray Manzarek, Robbie Krieger et John Densmore ont su jouer le décor musical des visons littéraires de Jim Morrison, sans compter que plusieurs morceaux, dont des tubes, ont été l’œuvre de Krieger, le plus connu étant leur premier succès, Light my fire.
Retrouvez les albums des Doors que j’ai chroniqués à ce jour :
Toujours d’actualité 50 ans après
Jim Morrison reste encore aujourd’hui une des figures les plus iconiques de l’histoire du rock. Il continue de susciter un attrait qui ne faiblit pas et une aura jamais ternie malgré les multiples ouvrages, documentaires et rééditions en tous genres. Récemment, l’album Laurel Canyon de Arman Méliès y faisait encore référence. Les visites sur sa tombe au cimetière du Père Lachaise sont souvent l’occasion de regroupements importants. Nul doute qu’aujourd’hui pour le cinquantenaire de sa disparition, on devrait voir de nombreux fans affluer.
Pour ceux qui préfèrent lire ses mots ou à propos de ses chansons, deux ouvrages à conseiller, l’un qui sort justement aujourd’hui, l’autre à paraitre en octobre :
The Doors : l’album, une notice d’écoute
Par Serge De Bono – Editions AO
Anthologie Jim Morrison : Poèmes, carnets, paroles …
Avant-Propos de Tom Robins – Editions Massot
L’engouement pour Jim Morrison n’a jamais été démenti depuis 1967, date de ses débuts avec les Doors. Et ce n’est pas un demi-siècle après sa mort que ça risque de changer. Alors, qu’on aime l’écrivain, le poète, le chanteur, l’icône rock… peu importe, le roi lézard continue de nous fasciner, car il est très loin d’avoir livré tous ses secrets.
© Jean-François Convert – Juillet 2021
Mon pote journaliste franco-américain Sam Bernett patron du Rock’n’roll Circus qui a trouvé Jim Morrison dans ses toilettes à l’époque et à écrit deux livres là-dessus me paraît bien plus crédible que bien des bouquins qui sortent
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