Le 22 juillet 1978, Dire Straits se produisait au Paris Theatre à Londres. Un show enregistré pour l’émission ‘Live in Concert‘, et qui sortira bien plus tard, le 26 juin 1995, sous le nom ‘Live at the BBC’.
Sommaire
Un concert pour la radio
Juillet 1978. Le groupe Dire Straits existe depuis un an. Le premier album du groupe est sorti le mois précédent et le single Sultans of swing commence à cartonner dans plusieurs pays d’Europe. Après le concert au Barbarella’s de Birmingham le 4, intéressons-nous à celui donné le 22 au Paris Theatre à Londres.
Le Paris Theatre était à l’origine un cinéma situé au 12 Lower Regent Street dans le centre de Londres qui a été transformé en studio par la BBC pour les émissions de radio nécessitant un public (Wikipédia). De nombreux artistes renommés y ont enregistré des concerts pour la BBC durant les sixties et seventies.
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Dire Straits se voit proposer d’y jouer le 22 juillet 1978 dans le cadre de la série Live in Concert. La prestation est ainsi enregistrée en public pour être diffusée ensuite (pas forcément en direct). La setlist est adaptée au format de l’émission et se voit donc fortement raccourcie par rapport à un concert classique (par exemple celui au Barbarella’s de Birmingham le 4 juillet). La seule trace visuelle de cette journée est cette photo où on voit Mark avec sa Stratocaster au manche érable et dans une tenue qui rappelle celle du clip Sultans of swing. A cette période, l’autre Stratocaster (celle avec le manche palissandre) est sans doute en train d’être repeinte en rouge par Steve Philips. Sur la photo, la Stratocaster de David semble encore elle aussi en finition naturelle et sera repeinte en noir dans les semaines qui suivent.
Un album live sorti 17 ans plus tard
Outre cette unique photo, c’est surtout l’enregistrement audio qui refait surface… 17 ans plus tard. Le 26 juin 1995 arrive dans les bacs Live at the BBC. La même année où justement ferme le Paris Theatre. Cet album live sort alors que Dire Straits n’est plus. Mark Knopfler a déjà dans la tête l’idée d’une carrière solo, et il n’autorise l’exhumation de ces archives que pour solder le contrat du groupe qui devait encore un album à Mercury, après On the night sorti en 1993.
Même s’il ne propose qu’une setlist raccourcie, le disque offre un témoignage live intéressant des premières années de Dire Straits. Bien sûr les versions jouées ne sont pas extrêmement différentes de celles en studio au niveau des arrangements, mais c’est surtout le son qui capte l’attention : la guitare de Mark sonne nettement plus crunchy que sur l’album, en grande partie à cause des enceintes Marshall utilisées par le guitariste. Il reviendra à un son à la fois plus chaud et plus doux dès l’automne de la même année en passant sur ampli Musicman.
La photo de la pochette correspond plutôt à la fin de l’année 1978, voire début 79 : le pantalon blanc et le marcel sont la tenue de scène de Mark durant l’automne (par exemple l’émission Chorus) et l’hiver qui suit (par exemple Rockpalast), et il porte autour du cou le fameux collier que je suspecte être un cadeau d’Holly Vincent, et qui n’apparait que fin 78.
De plus, la photo le montre avec la Stratocaster palissandre, mais comme dit plus haut, il y a de fortes chances pour qu’en ce mois de juillet 78 elle n’était pas disponible car en train d’être repeinte en rouge. Et la photo prise le 22 juillet au Paris Theatre confirme que Mark utilisait la Strat érable.
L’album chanson par chanson
Down to the Waterline
L’ouverture du premier album était parfaitement adaptée pour ouvrir les concerts : une intro baignant dans une atmosphère légèrement mystérieuse avant que les 4 musiciens ne partent ensemble d’une seule voix et lancent ainsi la dynamique de la setlist. On entend clairement que sur ce concert, David n’utilise pas l’effet phaser comme sur l’album. Il l’utilisera néanmoins à de nombreuses occasions sur scène (par exemple Rockpalast).
Six Blade Knife
J’adore cette version énergique et crunchy de ce titre. Alors que la version studio reste purement laidback, ici la guitare de Mark se fait plus rugueuse et prend une teinte bluesy nerveuse qui rend compte du son de Dire Straits sur scène à cette époque. A noter que Mark se mélange dans les paroles.
Water of Love
Alors qu’en studio la partie slide était jouée sur la guitare National (sans doute la Tricone), en live c’est la Telecaster Thinline (dont les ouïes ont été bouchées par Steve Philips) qui donne ce son, là aussi plus puissant et forcément électrique. Mark combine les deux parties lead (soit en slide, soit en jeu classique).
Wild West End
David prend cette même Telecaster Thinline accordée en Open de Sol pour interpréter la partie rythmique jouée à l’origine par Mark à la guitare National. Ce dernier ajoute un peu de delay sur son intro lead, avec toujours ce son rugueux.
Sultans of Swing
Le single en passe de devenir un tube dans les mois à venir apparait tout naturellement en fin de setlist, ou presque. L’enthousiasme du public laisse présager le succès futur du morceau.
Lions
Est-ce un rappel ? Mark présente la chanson comme « étrange », terme qu’il avait déjà utilisé pour Water of love (« une idée étrange »). Le final du morceau sonne très rock.
What’s The Matter Baby?
C’est l’unique titre inédit de l’album. Quand j’ai acheté Live at the BBC en 1995 (sur cassette !), je connaissais déjà ce morceau par le bootleg Barbarella’s découvert en 1992. Signé des deux frères Knopfler, il n’est sorti sur aucun autre opus officiel du groupe. Une sorte de reconnaissance pour le petit frère… qui au passage est crédité aux claviers sur le livret, sans aucun doute une faute de frappe, le mot « keyboards » ayant vraisemblablement pris la place de « vocals », et ce, quelque soient les éditions (vinyle, CD, cassette…)
Tunnel of Love
Autre erreur, la pochette indique que ce dernier morceau serait daté du 31 janvier 1981 pour l’émission The Old Grey Whistle Test. Mais il s’agit de la date de (re)diffusion de l’émission. En réalité, le morceau a été enregistré (et filmé) le 19 décembre 1980 à Dortmund.
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L’édition limitée
Live at the BBC est sorti sur de nombreux formats comme on peut le voir dans le listing de Jeroen Van Tol sur son site Oneverybootleg, mais c’est surtout l’édition limitée française qui offre l’intérêt d’un livret supplémentaire avec plusieurs photos, dont celle identifiée du jour du concert.
On y voit entre autres une des rares photos de la Stratocaster érable avec son potard de volume originel (photo noir & blanc, sur la troisième double page en partant de la gauche dans la galerie ci-dessus), l’autre seule photo à ma connaissance se trouvant dans le livre de Michael Oldfield.
Une édition limitée que j’avais d’abord eue sur cassette à sa sortie en 1995, puis plus tard sur CD. Et l’enregistrement qu’on entend sur ce dernier album de Dire Straits Live at the BBC provient donc de ce concert du 22 juillet 1978, qui se tenait il y a tout juste 45 ans aujourd’hui.
© Jean-François Convert – Juillet 2023
Ce que je comprends pas, c’est l’attitude des « britishs » à l’égard de ce groupe au tout début de sa carrière. Ironiquement, seuls des archives français (Chorus TV) et allemands (Rockpalast et autres documentaires) témoignent cette époque précise (hormis Old Grey Whistle). Je ne sais pas si le Live Alchemy sonnait vraiment comme une (enfin) reconnaissance du public londonien/britannique ?
Merci encore pour l’article. À propos du son crunchy, je suspecte que MK jouait qq titres avec sa Gibson LP Special (micros P90) comme témoignent des photos prises au Clapham Common 77, ou au Marquee Club 78.