Il y a 20 ans sortait la B.O. de ‘A shot at glory’ par Mark Knopfler

Les infos sur la date exacte différent selon les sources, mais le 15 octobre 2001 apparait comme une des dates possibles.

Préambule

Difficile de connaitre la date exacte de sortie du disque. En cherchant les infos sur différents sites, on trouve 2001 au Royaume-Uni chez Mercury sans plus de précision. La date du 28 avril 2002 est aussi citée, mais il s’agit a priori de la sortie Warner aux Etats-Unis. Le site officiel markknopfler.com indique une sortie en 2001 chez Warner, ce qui apporte encore un peu plus de confusion.

Ce qui est sûr, c’est que je me souviens parfaitement avoir acheté cet album en 2001, sans doute un import anglais. De plus, les autres dates indiquées sur Internet font souvent référence à la sortie du film, qui est différente de celle de la Bande Originale. Il semble que la BO de Mark Knopfler soit sortie dans les bacs avant même que le film soit distribué en salles.

Le film A shot at glory vu par © Denys Legros

Un film peu connu

Quoi qu’il en soit et quelque soit la date exacte de sortie de la BO, cette musique fête bien ses 20 ans cette année, de même que le film qui est indiqué avoir été produit en 1999, et sorti en 2002 selon les pays… Comme c’est souvent le cas pour les long-métrages dont Mark knopfler a composé la musique, il ne s’agit pas d’un blockbuster, loin de là. Et il est d’autant plus méconnu chez nous car, à ma connaissance, il n’est même pas sorti en salles françaises. Juste une édition DVD francophone, qui en plus confond le Pays de Galles avec l’Ecosse sur les notes de la jaquette, et à deux reprises…

J’avoue ne pas avoir vu le film jusqu’à présent. Je sais seulement qu’il se déroule dans le milieu du football, avec Robert Duvall dans le rôle de l’entraineur irascible. Mais en faisant des recherches, je découvre qu’il est disponible en intégralité sur YouTube et en plus en version française ! Cette lacune va donc être comblée rapidement dans les heures qui suivent.

Une des meilleures bandes originales de Knopfler

Indépendamment du film, cet album, car on peut quasiment le qualifier ainsi, est une des plus belles productions de Mark Knopfler, et une de ses meilleures musiques de films, à mon humble avis. Composé et enregistré à la même époque que l’album Sailing to Philadelphia, cet ensemble de 11 morceaux offre un dosage parfaitement équilibré des différents styles musicaux de Mark Knopfler : des chansons qui restent en tête, des mélodies accrocheuses, de la guitare étincelante, des influences écossaises et irlandaises marquées, des accents jazzy, et un thème principal somptueux.

De la musique traditionnelle

Mark Knopfler nous avait déjà habitué à des morceaux évoquant son Ecosse natale dans la B.O. de Local hero (1983), carrément typés irlandais dans la BO de Cal (1984), et surtout à travers son premier album solo Golden heart (1996) qui embrassait littéralement cette dimension celtique avec l’emploi de flûtes, violons et cornemuses, choses qu’il n’avait pas pu faire avec Dire Straits.

Ici, deux morceaux sont particulièrement dans cette couleur musicale : Training et The new laird. La guitare est seulement en accompagnement et les ‘Pipes’ se taillent la part du lion. Une façon de retranscrire l’ambiance du film, dont l’action se joue entre l’Ecosse et l’Irlande.

Quant au final Wild mountain Thyme, également connu sous les titres Purple Heather et Will You Go Lassie, Go, c’est une chanson folk enregistrée pour la première fois par Francis McPeake en 1957. Il ne s’agit donc pas d’une chanson traditionnelle, contrairement à ce que l’on croit fréquemment : elle est sous copyright de l’English Folk Dance and Song Society Publications. Elle a fait l’objet de nombreuses reprises. Il s’agit d’une variante d’une chanson traditionnelle The Braes of Balquhidder, écrite par Robert Tannahill (1774-1810), contemporain de Robert Burns. (Source Wikipedia)

Mais, sur Hard cases et Four in a row, Mark empoigne la guitare électrique et prend le devant de la scène, soit en occultant presque les cornemuses dans le premier cas, ou en jouant de concert avec elles sur le second. Et ce style, quelque part entre Dan Ar Braz et Mike Oldfield, est plutôt nouveau dans la discographie du guitar-hero. Certes, le fameux Going home flirtait déjà avec le cocktail guitare et mélodie irlando-écossaise, mais ici, et notamment sur Four in a row, la symbiose entre le jeu pyrotechnique du guitariste et les instruments traditionnels atteint une excellence qui malheureusement ne sera plus guère reproduite dans les futurs disques du maestro.

Par la suite, l’utilisation des flutes violons et cornemuses sera quasiment toujours au détriment de la guitare. Alors que dans A shot a glory, la six-cordes reste l’instrument-roi, bien que le panel des musiciens figurant sur le disque ne laisse aucun doute sur la proéminence des instruments celtiques :

Les débuts de Mark comme bassiste

On note au passage que dans ce ce line-up ne figure pas de bassiste… tout simplement car c’est Mark qui tient la basse sur tout l’album. Guy Fletcher avait d’ailleurs révélé sur son forum à l’époque que Mark avait été quelque peu vexé que le livret du disque ne mentionne pas ses débuts comme bassiste !

Mark pendant la tournée 2001 avec la fameuse ‘Pyrobass’, instrument utilisé (et malmené) par Glenn Worf sur le morceau Pyroman ► Plus d’infos ici

En 2006-2007, lors des sessions d’enregistrement de l’album Kill to get crimson, Mark et Guy joueront chacun de la basse sur les premières versions des morceaux, à l’étape de maquettes ou ‘pre-prod’. Mais leurs parties de basses seront rejouées par Glenn Worf pour le mix final, « un vrai bassiste, pas comme nous » selon les dires de Guy. En 2012, sur le double album Privateering, il semble que Guy tient la basse sur Rebdud tree, et qu’elle n’est pas été rejouée par Glenn Worf.

Pour A shot at glory, on peut supposer que c’est un budget restreint et un planning serré qui ont poussé Mark à jouer la basse, et à ne pas attendre la disponibilité d’un réel bassiste.

Trois chansons pour une BO

Mais le rôle de bassiste, somme toute anecdotique, ne doit pas occulter le talent de songwriter de Mark Knopfler. Et justement, une première dans sa discographie de musiques de films, A shot at glory comporte trois chansons. Jusqu’à présent, au plus figurait un morceau chanté par bande originale, parfois aucun, mais jamais plus : That’s the way it always start, A storybook love, Wag the dog, Metroland. Mais cette fois Mark se lâche et propose plus du quart de la tracklist (3 sur 11) en chansons. C’est en ça que je considère cette BO presque comme un album, en tout cas pas loin.

He’s the man pourrait presqu’être un titre de Dire Straits avec ses sons synthétiques et son refrain qui sonne un peu JJ Cale. Sur Say too much, Mark la joue feutré et jazzy, tandis que le fidèle Chris White (à l’époque) semble susurrer dans son saxophone, à la manière de Stan Getz. Enfin, All that I have in the world est superbe ballade aux couleurs irlandaises, avec la Les Paul qui rugit comme dans Before Gas and TV ou Drover’s road.

Le thème principal magnifique

Mais s’il fallait ne retenir qu’un seul morceau de tout le disque, je voterai sans hésiter pour le thème récurrent Sons of Scotland, qui se décline sur trois titres. L’ouverture déborde de sérénité et de plénitude. Il y a du Wild theme dans ce Sons of Scotland, comme il y a aussi du Long road et du Irish love. Un son de guitare pas très éloigné d’ailleurs. Serait-ce là aussi la Schecter Telecaster rouge ? Difficile à dire. Ce pourrait tout aussi bien être la Schecter Stratocaster, la Fender Stratocaster de 61 (en 2000-2001 elle était de nouveau la strato fétiche de Mark), la Fender Stratocaster de 64, ou pourquoi pas la Pensa MKII.

Mais ce qui ne fait aucun doute, c’est la beauté de la mélodie. Si vous recherchez la quiétude, écoutez ce morceau. La deuxième déclinaison s’appelle d’ailleurs Quiet theme. L’électrique semble ici remplacée par une électrique, tandis que les arpèges aux claviers ont quelques réminiscences de Smooching (sur Local hero en 1983). Enfin, It’s over propose en introduction une mini-compilation des précédents thèmes exposés (notamment Training et The new laird, mais dans une autre tonalité) avant de reprendre le thème principal, à nouveau à l’électrique, avec encore un peu plus de delay.

Un morceau que je trouve personnellement magnifique. Je l’ai utilisé (comme d’autres) pour illustrer des films de famille tournés en Super 8 par mon père, et c’est là qu’on s’aperçoit du pouvoir magique de certaines musiques sur des images. Mark Knopfler sait composer pour le cinéma, c’est une évidence. Ses bandes originales de films n’ont pas eu toujours le succès escompté du fiat de la faible notoriété des films auxquels il a participé. Mais elles méritent largement d’être découvertes, tout autant que ses albums solo et ceux de Dire Straits.

Alors si vous ne connaissez pas encore A shot at glory, c’est l’occasion aujourd’hui d’y plonger les yeux fermés et les oreilles grandes ouvertes pour son 20ème anniversaire.

© Jean-François Convert – Octobre 2021

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