Il fallait le voir, ça y est c’est fait. ‘Un parfait inconnu’ est l’un des meilleurs biopics que j’ai vu jusqu’à présent.

La mode des biopics n’en finit plus. J’en ai vu plusieurs récemment, avec plus ou moins de bonheur : Elvis, Priscilla, Amy Winehouse, Bob Marley… Et d’autres il y a plus longtemps dont je garde un bien meilleur souvenir : Charlie Parker, Johnny Cash, Ray Charles… Et pour l’avoir vu aujourd’hui, je classe Un parfait inconnu clairement dans cette deuxième catégorie.

Pas vraiment surprenant dans la mesure où il est réalisé par James Mangold, déjà auteur du brillant Walk the line sur Johnny Cash. Il reprend ici le même principe d’extraire un texte de chanson pour titrer son film : a complete unknown (« Un parfait inconnu » en VF) est bien évidemment issu des paroles de Like a rolling stone, chanson phare de Bob Dylan, et qui a été un moment charnière de sa carrière, moment bien retranscrit dans le long-métrage.

Premièrement, les 2h20 passent de façon très fluide. Les séquences variées s’enchainent sans temps mort. Scènes intimistes, concerts, jams impromptues… le déroulé des évènements illustre parfaitement les changements dans la vie de l’artiste. Ensuite, la reconstitution est appliquée : les coulisses du Newport Folk Festival, les enregistrements en studio, le New York des sixties… et surtout l’interprétation.

Thimothée Chalamet incarne Dylan à la perfection, que ce soit le timide chanteur folk à casquette des débuts ou la rockstar naissante sur sa Triumph à peine 3 ans plus tard. Sans parler de chanter lui-même (et jouer à la guitare et l’harmonica !) les morceaux. Excellente performance qui a valu à l’acteur d’être nommé aux oscars… verdict ? L’avenir nous le dira.

Cette parfaite reconstitution d’époque liée à l’interprétation impeccable (mention spéciale à Edward Norton en Pete Seeger et Monica Barbaro en Joan Baez, elle aussi nommée aux Oscars) donne parfois l’impression d’assister à des scènes du célèbre documentaire Don’t look back de D.A. Pennebaker.

J’ai beaucoup aimé plusieurs moments, pour la plupart musicaux, entre autres :

• l’enregistrement de Like a rolling stone avec l’arrivée d’Al Kooper
• la première interprétation sur scène de The Times they are A changin’ à Newport et le public qui scande le refrain
• les deux voix de Baez et Dylan chantant Blowin’ in the wind dans la chambre
• le duo impromptu entre Dylan et Seeger lors d’une réception mondaine
• l’autre duo impromptu entre Dylan et le bluesman Jesse Moffette à l’émission de Seeger
• ce même Pete Seeger faisant reprendre au public les chœurs du traditionnel Mbuben repris sous le titre Wimoweh, qui donnera naissance au tube The lion sleeps tonight
• le fait de rappeler que Dylan n’a pas été le premier a jouer en formation électrique au festival de Newport, puisqu’avant lui il y a eu notamment Johnny Cash ou le Paul Butterfield Blues Band

Enfin, comme dans tout biopic qui se respecte, Un parfait inconnu comporte quelques entorses avec la réalité (compilées dans cet article sur ), mais elles ne trahissent pas tant que ça les faits, et le propos général reste fidèle à l’Histoire avec un grand H. De plus, il faut préciser que Bob Dylan en personne a d’une part adoubé Timothée Chalamet et d’autre part validé le scénario en insistant même pour y rajouter une scène fictive… on peut supposer qu’il s’agit de celle à l’hôpital avec Seeger et Guthrie.

Un biopic sur Dylan approuvé par Dylan lui-même ? Pas étonnant donc qu’on trouve le film d’excellente facture. Si vous ne l’avez pas encore fait, courrez vite voir ce « parfait inconnu » devenu au fil des décennies un mythe de la culture du XXe siècle et le seul auteur-compositeur à avoir reçu le prix Nobel de Littérature. Ce long-métrage ne solutionne pas le mystère de la légende Dylan, loin de là, mais il permet d’en percevoir les origines.

© Jean-François Convert – Février 2025