Il y a 40 ans, Georges Brassens nous quittait

Le 29 octobre 1981, Tonton Georges cassait sa vieille pipe en bois.

© Denys Legros

Chansons pour enfants

En octobre 1981 j’avais 10 ans. Je ne me souviens pas de l’annonce du décès de Georges Brassens. Mais ce dont je me souviens, c’est qu’à cette époque on l’écoutait à la maison, à travers ce 45 Tours livre-disque Brassens chante pour les enfants. Comme son nom l’indique, il s’agissait d’un opus destiné aux oreilles chastes, qui contenait 4 morceaux : Le petit cheval, Je rejoindrai ma belle, Les sabots d’Hélène et La cane de Jeanne. Ce disque a été ma première approche avec cette sommité du patrimoine français. Et tout de suite, ce qui m’a instantanément accroché c’est son sens de la mélodie.

Poète et musicien

Et puis plus tard, au collège, la prof de français a évoqué à plusieurs reprises le poète (bien qu’il ne se considérait pas comme tel), l’amoureux de la langue, le magicien des mots. Madame Fournier nous avait fait écouter notamment Le petit joueur de fluteau. Je n’ai appris bien plus tard que ce texte est en fait une version poétique du refus de Brassens d’accéder à un fauteuil à l’Académie Française, invitation qu’il a déclinée. Ce genre d’infos (et bien d’autres) se trouve sur l’excellent site analysebrassens.

Toujours au collège, j’ai découvert que l’écrivain Brassens mettait aussi en musique des textes d’autres auteurs (auparavant, je ne savais pas encore que Le petit cheval était de Paul Fort). Pour ma dernière année au club théâtre, en troisième, le spectacle de fin d’année avait pour thème Victor Hugo. Tandis que je jouais les rôles de Ruy Blas et Quasimodo dans deux scènes, la chorale interprétait à d’autres moments deux chansons de Brassens en lien avec l’auteur des Misérables : Gastibelza et La légende de la nonne. Encore une mélodie qui prouve la riche musicalité de Brassens, comme par exemple avec cette reprise par la chanteuse italienne Gigliola Cinquetti :

Paroles pour public averti

Et puis plus tard, à l’adolescence et surtout autour de la vingtaine, j’ai découvert le trublion, l’anarchiste, le paillard. Après les chansons pour enfant, il était temps d’écouter les textes jouissifs de Brave Margot, Le Gorille, Hécatombe, Les trompettes de la renommée, Le pornographe, Le bulletin de santé, Fernande, ou encore l’inénarrable P… de toi. Pour cette dernière, j’adore cette version rare en public où les personnes dans l’assistance accompagnent avec entrain le chanteur hilare, et l’aident à se souvenir des paroles :

Une richesse de la langue qu’il savait manier aussi bien dans le poétique que dans le grivois. Et comme le faisait remarquer Maxime Leforestier, grand exégète des textes de Brassens, l’auteur sétois est parvenu au tour de force dans Mélanie à écrire « ce qu’il y a de plus gore dans sa discographie » (selon les mots de Leforestier) sans utiliser un seul mot d’argot :

Quelqu’un de la famille

En 2011, j’avais bien aimé le téléfilm La mauvaise réputation qui retrace la jeunesse de Brassens avant son accès à la notoriété . On y voit entre autres son passage au STO, sa relation ambigüe avec Jeanne Marie Le Bonniec et sa vie impasse Florimont, et également ses frasques d’adolescent avec ses copains à Sète. Un épisode que le futur musicien jugera peu reluisant, et qui fera l’objet de la chanson Les quatre bacheliers.

Le fait de s’attarder sur ces années d’avant la célébrité le rend encore plus humain qu’il ne l’était déjà. La ressemblance de l’acteur avec un de mes oncles (lui aussi moustachu et fumant la pipe) m’a donné l’impression que Brassens était quelqu’un de la famille. Ce n’est pas pour rien si on le surnomme souvent Tonton Georges. Un proche avec qui on aurait aimé discuter des heures.

Des chansons pour tous les âges

Aujourd’hui j’écoute toujours Brassens régulièrement. Que ce soit le poète frivole de La chasse aux papillons, Brave Margot ou Dans l’eau de la claire fontaine, l’abolitionniste du Gorille, le rêveur romantique des Bancs publics, l’amoureux transi de L’orage, Le Parapluie ou La non-demande en mariage, le bon vivant de Fernande, des Funérailles d’antan et La femme d’Hector, l’anticonformiste de La mauvaise réputation, La mauvaise herbe et Mourir pour des idées, l’anti politiquement correct des Deux oncles

Mais aussi le musicien de Heureux qui comme Ulysse, La légende de la nonne ou Le petit cheval, le parolier sarcastique des Trompettes de la renommée, le contrairement aux idées reçues pas misogyne des Passantes ou de La complainte des filles de joie, et l’auteur à la fois grave et léger du Testament et de Supplique pour être enterré à la plage de Sète (un de ses textes les plus longs).

Oui Brassens peut s’écouter à l’école maternelle ou au lycée, tout comme à l’âge adulte. Des chansons pour toutes les périodes de la vie. Et c’est comme ça qu’il m’accompagne encore maintenant. 40 ans qu’il est parti, mais finalement, il est toujours là.

© Jean-François Convert – Octobre 2021

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2 commentaires sur “Il y a 40 ans, Georges Brassens nous quittait

  1. En fait, je crois que je ne connais personne qui n’aime pas Brassens… Merci pour ce papier très sympa.

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  2. Tu en parles si bien, de l’oncle, mon poto, que ça m’en tire les larmes . je suis fier de voir mon crobard associé à ta chronique si tendre.

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