En février 1983 arrivait dans les bacs ce huitième album studio d’Eric Clapton. Un disque de guitares avec la participation de Ry Cooder et Albert Lee.
Sommaire
Un album à part
Money and cigarettes fait un peu figure d’outsider dans la discographie d’Eric Clapton. Pas très connu, rarement cité, et peu joué en live, cet album est à part à plusieurs titres : hormis Albert Lee, les musiciens sont nouveaux par rapport à la tournée de Just One Night et l’album studio Another Ticket. On trouve ici le bassiste Donal ‘Duck’ Dunn, vétéran de chez Stax, et des Blues Brothers, le batteur Roger Hawkins, les choristes Chuck Kirkpatrick et John Sambataro, et surtout Ry Cooder en troisième guitariste.
Ensuite, c’est le premier disque de Clapton chez Warner après son départ de Polydor (Universal). Mais il n’est pas produit par Phil Collins comme le seront les suivants (Behind the sun et August). Sur celui-ci, c’est encore le fidèle Tom Dowd aux manettes (présent depuis le légendaire Layla and other assorted love songs). Ce qui fait de Money and cigarettes un hybride entre le Clapton des seventies et celui des eighties.
Enfin, l’enregistrement de l’album fait suite à la première cure de désintoxication du guitariste à l’alcool, le titre exprimant selon lui « tout ce qui lui reste ». Il faudra attendre d’autres cures et la fin des années 80 pour que Clapton parvienne à la sobriété définitive. Quant à la pochette, on peut y voir une sorte de clin d’œil à Dali avec une stratocaster rouge « fondue » sur un sèche-linge.
Un album très guitares
La musique de Money and cigarettes n’a en tout cas rien de surréaliste et met les guitares très en avant, bien plus que sur le précédent Another Ticket et les suivants aux sonorités synthétiques so eighties. La présence des trois guitaristes offre des solos à plusieurs couleurs. Dès l’ouverture, Everybody Oughta Make A Change, une reprise de Sleepy John Estes, les slides de Clapton et Cooder se répondent. En live, Slowhand jouait seul la partie de slide sur sa stratocaster bleue (la même qu’on voit dans le Live’85 sur Tulsa Time et Motherless Children) :
En revanche, le duo de solos entre Clapton et Albert Lee Sur The Shape You’re In était bien reproduit en live par les deux mêmes protagonistes durant la tournée de 1983. On entend le style caractéristique de Lee à la Telecaster (à cette époque il n’avait pas encore son modèle signature MusicMan). Quant à la guitare de Clapton, une photo de l’époque (comme l’atteste la présence de Donald ‘Duck’ Dunn à la basse) le montre avec une Les Paul, mais pas sûr que ce soit sur ce morceau.
La guitare est à l’honneur sur tous les titres, du standard blues Crosscut Saw (un classique du répertoire d’Albert King) au rock’n’roll Slow Down Linda, en passant par l’entêtant Man Overboard ou Ain’t Going Down morceau dans lequel l’ancien addict affirme qu’il ne replongera plus. « ’cause I ain’t going down anymore ».
Un Clapton amoureux
D’ailleurs à cette époque, Clapton n’a plus vraiment de raisons d’être déprimé. Il file le parfait amour avec Pattie Boyd qu’il a épousé en 1979. Après l’avoir déjà mise en scène dans Wonderful Tonight, le chanteur-guitariste évoque à nouveau sa muse à plusieurs reprises dans des chansons où il s’affiche comme un amoureux transi : Man In Love, I’ve Got A Rock ‘N’ Roll Heart et surtout Pretty Girl.
Sur cette très belle ballade en forme de déclaration d’amour, on peut déduire que c’est Albert Lee qui joue le premier solo, car il est le seul crédité à la guitare acoustique. Clapton renchérit ensuite avec probablement Blackie qui s’envole sur l’outro. Peut-être le meilleur morceau de l’album à mon goût, et qui en tout cas ouvre merveilleusement la deuxième face.
Mon premier Clapton
Car oui, quand j’ai écouté cet album pour la première fois, il y avait deux faces, puisqu’il s’agissait… d’une cassette. En 1989, après avoir découvert Clapton au concert pour les 70 ans de Mandela en juin 1988 où il accompagne Dire Straits, je débute sa discographie par ce Money and cigarettes, emprunté dans une médiathèque, et aussitôt copié, puis écouté en boucle pendant des années.
C’est par cet album que je suis entré dans la musique d’un des plus grands guitaristes de l’histoire du rock. C’était avant de découvrir ses chefs-d’œuvres comme E.C. was here ou Layla and other assorted love songs. Alors forcément, il occupe une place particulière dans mes souvenirs. Et il mérite à mon sens d’être redécouvert, par exemple à l’occasion de son quarantenaire ce mois-ci.
© Jean-François Convert – Février 2023
Merci pour cet article. J avais zappé cet LP. Très bonne découverte. Il y a tellement de choses à écouter!
Merci pour cet article. J avais zappé cet LP. Très bonne découverte. Il y a tellement de choses à écouter!