The Wilds revisitent les standards du blues-rock

Dans l’album ‘Rock the Bone’, le duo The Wilds reprend des morceaux célèbres du répertoire blues-rock en les transfigurant totalement.

L’exercice de la reprise musicale est souvent périlleux. Comment s’approprier une chanson qui n’est pas sienne ? Lui apporter sa patte sans la trahir ? Nombre de reprises dans l’histoire de la musique moderne ont connu des destins divers et variés, des succès plus grands que leurs sources originelles, ou au contraire des flops retentissants, en passant par des confusions à ne plus savoir de qui était tel morceau, ou pire, des imbroglios judiciaires pour plagiat, avéré ou non. Entre l’hommage appuyé et parfois scolaire ou au contraire la remise au goût du jour et réadaptation dans un style complètement différent, la « cover » fait partie intégrante du répertoire pop-rock.

Le duo The Wilds a choisi d’interpréter des titres ultra-connus, mais en les modifiant de telle façon à ce qu’on a parfois du mal à les reconnaitre. Une démarche pleinement assumée comme l’explique le chanteur-guitariste Mark Alberts :

« Des reprises, mais tellement destroyées, martyrises, malaxées, qu’on les reconnait à peine »

Effectivement, à la première écoute je n’avais pas regardé les titres indiquées sur la pochette. Mais quelques paroles m’ont immédiatement interpelé, et j’ai « reconnu » Light my fire, That’s allright Mama, Rock me baby et I put a spell on you. Enfin, « reconnu » est un bien grand mot… j’ai quand même dû vérifier les noms des morceaux pour en avoir le cœur net !

Avec seulement deux voix, une guitare, une basse et une boite à rythmes, les arrangements sonnent indubitablement garage-rock. D’ailleurs, le titre de l’album donne la couleur : Rock to the bone, signifie littéralement « le rock jusqu’à l’os », mais on pourrait aussi bien le traduire par « le rock à l’état pur ». Un son sauvage et primal qui tend à retrouver l’esprit originel du blues et du rock.

Mais dans le même temps, les grilles d’accords des morceaux sont souvent modifiées. C’est notamment le cas sur Light my fire, That’s allright mama ou I put a spell on you. La réadaptation n’est pas que sonore ou rythmique, elle est aussi harmonique. En terme d’atmosphère musicale, Then she kissed me des Crystals est sans doute la plus méconnaissable de toutes ces reprises ; l’innocence soul-sixties de la version originale est ici balayée dans un tourbillon de fuzz et une rythmique bulldozer.

I put a spell on you reste dans son esprit blues de Screamin Jay Hawkins, et on a de toute façons déjà entendu d’autres réinterprétations, entre autres par Creedence Clerawater Revival ou Nina Simone. About a girl de Nirvana est transformé en ternaire ce qui lui confère un groove différent. Quant à Rock me baby, c’est sans aucun doute le morceau qui reste le plus fidèle, le plus ressemblant à l’original (alors que Jimi Hendrix l’avait nettement plus modifié en terme rythmique).

Aux cotés de ces reprises de standards, on trouve des compositions originales qui ne dépareillent pas. Les énergiques Shots of love et That girl is killing me ou le très beau blues crépusculaire Bad love heroes ne font pas pâle figure en comparaison de leurs ainés, bien au contraire. On sent que le fait d’avoir « malaxé » les chansons de référence ont permis au duo de s’approprier tout un vocabulaire rock et de l’insuffler dans ses propres créations.

Comment réinventer le langage blues-rock en partant de morceaux mille fois entendus ? Il semble que The Wilds aient trouver la recette : ne surtout pas respecter la structure originelle des chansons et aller jusqu’à presque les réécrire. Les règles sont faites pour être transgressées, et en attaquant le rock jusqu’à l’os, le duo The Wilds parvient à en extraire la substantifique moelle.

Rock to the Bone est paru le 6 juin chez Inouïe Distribution.

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© Jean-François Convert – Juillet 2025

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