Paul McCartney, une légende vivante qui a su rester simple

Jeudi, Paul McCartney jouait pour son deuxième soir de suite à la Défense Arena à Paris. Je le voyais sur scène pour la première fois. 2h30 de concert où je suis resté en apesanteur, tandis qu’il mêlait humour, décontraction et totale maitrise du show.

Une marée humaine

Rien d’étonnant à ce qu’il y ait une telle foule pour venir voir l’ex-Beatle, mais j’ai le souvenir que pour le concert de Springsteen l’année dernière au même endroit, la queue pour atteindre l’entrée était plus fluide. Là c’était vraiment impressionnant.

Une fois entré dans la salle, on avait droit à un DJ diffusant des chansons des Beatles bien sûr, mais aussi des adaptions françaises, et des titres des Wings ou de McCartney en solo. Il y avait pas mal de morceaux de Lennon (au sein des Beatles), et les écrans projetaient des vidéos de souvenirs des Fab Four.

Entrée fracassante

Et puis les lumières s’éteignent, l’image de la basse mythique Hofner apparait sur les écrans, tandis que retentit la célèbre phrase qui referme Abbey Road le chant du cygne des Beatles :

« And in the end the love you take is equal to the love you make »

Paul entre en scène avec la dite basse, marquée par les ans (des coups de mediator en dessous des cordes ?) et tout de suite il attaque par un hymne que tout le monde connait : A hard day’s night, morceau-titre de l’album qui a fêté ses 60 ans en juillet dernier (la veille, il avait ouvert avec Can’t buy me love du même album). Tout le monde est déjà debout, même les spectateurs en places assises sur le parterre, dont je fais partie.

82 ans, mais visiblement très en forme, Macca aime son public qui le lui rend bien. « Bonsoir la France. Salut Paname ! » lance-t-il aux plus de 40.000 personnes de cette Défense Arena bondée. En deux dates, les 4 et 5 décembre, il a ainsi réuni près de 90.000 fans !

Cocktail Beatles / Wings / Solo

Avec un tel répertoire s’étalant sur plus de 6 décennies, l’auteur-compositeur-interprète doit forcément faire des choix. Macca propose un cocktail très équilibré entre les différentes phases de sa carrière, comme il l’annonce lui-même : « Old songs, new songs and in between songs…. yeah !!!! »

Après Junior’s Farm et Letting Go, on retourne ainsi à l’ère Beatles avec Drive My Car et Got To Get You Into My Life, illustré par des vidéos animées où les Beatles apparaissent façon mangas. Entre les chansons, Paul ne manque jamais de glisser une petite phrase : « C’est bon d’être de retour. Je vais essayer de vous parler un peu français… »

Sur Come On To Me, où Brian Ray joue du Coral Sitar, je remarque que Paul scrute à plusieurs reprises le manche de sa basse pour atteindre une case haute en début de reprises après une phrase chantée. Il troque la basse pour la guitare sur Let Me Roll It et son riff tranchant, ainsi que Getting Better, titre auquel je ne m’attendais pas et que j’adore. Entre les deux, il insère le riff de Foxy Lady et rend hommage à Jimi Hendrix. On se souvient que le guitariste avait fortement impressionné les Beatles en 1967.

Let ’em in donne l’occasion de diffuser des images de prides. Les Wings occupent une bonne part de la setlist. Nineteen Hundred And Eighty Five entrecoupe deux titres dédiés aux amours de la vie de McCartney :

  • My Valentine qu’il dit avoir écrite pour sa sa femme Nancy présente ce soir. La chanson est illustrée par le clip où Natalie Portman et Johnny Depp communiquent en langue des signes. Le solo joué par Rusty Anderson est synchronisé avec la vidéo de Depp.
  • Maybe I’m Amazed, déclaration d’amour à sa femme de l’époque, Linda. Un morceau qui figure sur son premier album solo éponyme en 1970. On voit d’ailleurs des images de cette période.

Le set acoustique

Quand je vois arriver la guitare folk, je me dis « ça va être Blackbird« … mais non, c’est I’ve Just Seen A Face, suivi de In Spite Of All The Danger, « la toute première chanson enregistrée par les Beatles » indique Paul (plus précisément par les Quarrymen si on veut chipoter). Puis c’est Love me do, où le claviériste Wix Wickens reprend la partie d’harmonica de Lennon.

On reste dans les nuages avec Michelle, une autre chanson à laquelle je ne m’attendais pas, il faut dire qu’il y en a tellement…. Cette fois c’est la mandoline pour Dance Tonight où le batteur Abe Laboriel Jr. se fend d’une chorégraphie qui suscite la clameur du public.

Mais le plus beau moment est à venir…

L’acmé du concert

La chanson tant attendue arrive enfin. Le chef d’œuvre Blackbird offre un moment suspendu : Paul seul en scène avec juste sa guitare, perché sur un superbe décor, chante cette douce ballade au double sens politique contre la ségrégation. Il se paie même le luxe d’une reprise du deuxième couplet. Soyons honnête, sa voix n’est plus ce qu’elle était (c’est sans doute pour ça qu’elle est relativement basse dans le mix durant tout le concert), et cette version n’est pas la meilleure interprétation vocale de McCartney. Mais l’intensité et la magie de la mise en scène placent malgré tout ce moment comme l’un des plus beaux de la soirée, à mon goût.

Hommage à John

Tant qu’à faire de rester dans l’émotion, Paul enchaine avec un vibrant hommage à son « grand ami John ». C’est Here Today de l’album Tug of war, enregistré entre février 1981 et janvier 1982, consécutivement à l’assassinat de John Lennon. Immédiatement derrière, Now and then, le single sorti il y a tout juste un an, une chanson mêlant la voix de John issue d’une de ses démos, avec les parties musicales de Ringo et Paul, dont la guitare slide inspirée par George. Les écrans projettent le clip. On voit ainsi le Paul actuel derrière lui-même en train de jouer. Autant je trouvais que les images d’archives étaient toujours à propos, autant là, ça ne m’a pas semblé très judicieux.

Après les tubes Lady Madonna et Jet, Macca annonce un morceau issu de Sgt. Pepper… je m’attendais à tout sauf Being For The Benefit of Mr. Kite ! Une façon supplémentaire pour le Beatle d’honorer son ancien partenaire avec qui il a écrit et composé tant de chansons célèbres.

Hommage à George

Mais Paul n’oublie pas non plus son « frérot » George. C’est le somptueux Something réarrangé comme il le joue depuis plusieurs années. Après la basse, la guitare, le piano, la mandoline, place au ukulélé ! Un début de morceau acoustique au tempo badin, différent de l’original, puis tout le groupe entre en scène au moment du solo. Un autre instant magique du concert pour moi, George restant à jamais mon Beatle préféré, en plus avec ce morceau que j’ai eu le plaisir de jouer au printemps.

Final Grandiose

À partir de là, la stelist devient un enchainement ininterrompu de tubes ! Paul Invite le public à reprendre en chœur le refrain de Obladi Oblada, il enchaine sur Band on the run, autre morceau que j’ai interprété récemment. Pas le temps de reprendre ses esprits qu’arrive Get back ! Forcément incontournable vu le nom de la tournée ‘Got Back Tour‘.

Puis la Défense Arena se pare de mille feux pour accompagner Let it be. Rusty Anderson joue le solo avec un son typé Leslie, comme sur la version single du morceau (à la différence de la version album). Vient enfin Live and let die avec son final pyrotechnique !

Final ? Non pas encore, parce qu’arrive Hey Jude où plus de 40.000 personnes reprennent en chœur les célébrissimes « na na na na ». Qui a été l’heureu-s-e élu-e à recevoir le tambourin lancé par Brian Ray dans le public ? Après avoir fait chanter séparément les filles et les garçons, Paul quitte la scène… mais il ne tarde pas à revenir.

Rappel au même niveau

On pensait avoir atteint l’apothéose, mais les rappels nous gardent au sommet. Macca et son groupe reviennent sur scène avec des drapeaux : anglais, français et LGBTQ+. Les musiciens vont nous servir le plus beau des finals.

D’abord I got a feeling que le Beatle introduit par « this next song is very special for me, you will see why »…. Si la chanson est si spéciale pour lui, c’est qu’elle permet à Paul de chanter en duo avec John. L’écran diffuse l’extrait du fameux concert sur le toit de 1969 où Lennon chante sa propre partie, en synchro avec le groupe sur scène. McCartney explique que ce dispositif est l’œuvre de Peter Jackson (par ailleurs réalisateur de la série de films The Beatles : Get Back sur Disney+) et que ce dernier est dans l’assitance ce soir. D’autres personnalités telles Louis Bertignac, Philippe Manœuvre ou Antoine de Caunes ont posté des vidéos attestant également de leur présence. A la fin du morceau, notre Paulo improvise un solo bien rock.

Puis vient Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band (Reprise) avec en images les personnages de la célèbre pochette réalisée par Peter Blake qui prennent vie sous nos yeux. La poupée avec son pull souhaitant la bienvenue aux Rolling Stones figure parmi les nombreux clins d’œil animés. Les paroles de la chanson « We hope you have enjoyed the show » pourraient laisser croire qu’il s’agit de la fin… mais non, on a droit à Helter Skelter ! Il ne fallait pas moins de trois guitares pour ce morceau d’anthologie, parfois qualifié de premier heavy metal de l’histoire du rock (pour ma part j’ai toujours trouvé qu’il sonnait plutôt « grunge »). Et les musiciens s’autorisent même un peu d’impro à la fin en s’écartant légèrement des parties guitares de la version studio.

Et pour finir, ce sera symboliquement la fin du medley du dernier album des Beatles, qui se termine par le bien nommé The End. Après avoir présenté son équipe technique et son groupe, Paul McCartney s’assoit au piano et entonne Golden Slumbers. Suivent naturellement Carry that weight et The end où le Beatle prend une autre Les Paul pour les fameux solos. Le concert se termine ainsi comme il avait commencé, sur cette phrase mythique « Et à la fin, l’amour que vous prenez est égal à l’amour que vous produisez ».

36 morceaux, plus de 2h30 de concert…

On est ému, on vient de voir une légende vivante, et qui paradoxalement ne se la pète pas, n’en fait pas des caisses. Paul McCartney est à mes yeux le plus grand mélodiste de l’histoire de la pop, et pourtant il ne donne pas l’impression d’avoir pris la grosse tête. Il reste naturel en toute circonstance. Comme il le disait en interview « vous savez au final, tout ça, ce ne sont que des chansons… » Oui mais quelles chansons ! Merci Paul.

© Jean-François Convert – Décembre 2024

Setlist

  1. A Hard Day’s Night
  2. Junior’s Farm
  3. Letting Go
  4. Drive My Car
  5. Got To Get You Into My Life
  6. Come On To Me
  7. Let Me Roll It
  8. Getting Better
  9. Let’ Em In
  10. My Valentine
  11. Nineteen Hundred And Eighty Five
  12. Maybe I’m Amazed
  13. I’ve Just Seen A Face
  14. In Spite Of All The Danger
  15. Love Me Do
  16. Michelle
  17. Dance Tonight
  18. Blackbird
  19. Here Today
  20. Now And Then
  21. Lady Madonna
  22. Jet
  23. Being For The Benefit of Mr. Kite
  24. Something
  25. Obladi Oblada
  26. Band On The Run
  27. Get Back
  28. Let It Be
  29. Live And Let Die
  30. Hey Jude
  31. I’ve Got A Feeling
  32. Sgt. Pepper’s Lonely Hearts Club Band (Reprise)
  33. Helter Skelter
  34. Golden Slumbers
  35. Carry That Weight
  36. The End
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3 commentaires sur “Paul McCartney, une légende vivante qui a su rester simple

  1. Totalement incroyable ce que fait cette bande de vieux schnoks ! Il sont dopés à la musique ou quoi ?
    Merci pour ce partage !
    Caro

    1
  2. Salut Jeff ! Extraordinaire chronique tellement méritée par Sir Paul ! Merci de nous avoir fait partager tes émotions et ressentis puis toutes ces vidéos. Les larmes me sont montées aux yeux à plusieurs reprises. Merci encore….
    Gil

    2
  3. Thanks!
    Ze étions aussi.
    Merci pour le résumé, les vidéos du concert et les fun facts de la soirée.

    C’était une première pour moi aussi.
    Et je ne m’en remet toujours pas.

    C’était irréel.

    1

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