Vendredi et samedi derniers avait lieu la sixième édition du festival Koodshow avec Sanseverino en tête d’affiche sur le deuxième soir.
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Une nouvelle formule avec scène ouverte
Pour cette sixième édition, le festival Koodshow à Cailloux-sur -Fontaines, près de Lyon, inaugurait une nouvelle formule : en plus des deux soirées de concerts, des masterclass avec Norbert ‘Nono’ Krief et Patrick Rondat, et des stands de luthiers (dont celui de Luis Henriques), la journée de samedi proposait une scène ouverte se déroulant sur l’après-midi.
Avec Alaia (chanteuse du Kurt Blues Band), nous nous étions inscrits pour un duo guitare-voix de reprises pop-folk. Une idée qui s’est décidée un peu au dernier moment, si bien qu’on a pu répéter qu’une seule fois. Ce samedi, c’était en quelque sorte notre deuxième répétition… mais en public !
Notre Setlist :
- Heart of gold
- Dreams
- Dock of the bay
- Wicked games
- Wild Horses
- Glory Box
- What’s up
- What a wonderful world
- Glory Days
- That I Would Be Good
- While my guitar gently weeps
- A horse with no name
- Uninvited
- Knockin on heaven’s door
J’avais pris ma guitare folk avec un vieux micro inséré dans la rosace, comme j’avais fait pour la fête de la musique. Mais il s’avère que 1) cette guitare bas de gamme ne vieillit pas bien avec l’âge et 2) ce micro donne une coloration trop électrique. Sur cet extrait de Dreams de Fleetwood Mac, on a l’impression qu’il y a un phaser/flanger, alors que le jack est branché directement dans la console !
Sans compter que je me suis bien vautré à plusieurs reprises et notamment sur What a wonderful world. Mais c’est pas grave, c’était une première, et on ne pourra que s’améliorer, pour que ce duo continue à donner d’autres représentations à l’avenir.
Une guitare spéciale pour l’occasion
Luis Henriques (le luthier qui s’est occupé de plusieurs de mes guitares) avait confectionné un modèle unique, spécialement pour le festival : la Pigargus. Des repères en nacre, une finition dégradée en bleu-vert-turquoise, le tout dans des délais très courts, puisqu’il l’a terminée la veille !
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C’était également l’occasion d’admirer la Stratorino, une guitare inspirée par la Ford Torino de la série Starsky & Hutch ! Et n’allez pas lui dire, comme les jeunes générations, que c’est une guitare Nike !
Il a même réalisé une vidéo avec des images extraites du générique de la série, qu’il joue en version instrumentale :
Et le vendredi soir, ce n’est pas « Zebra 3 » qui a été sollicité, mais plutôt le 18…
L’incident qui aurait pu mal tourner
« Koodshow a mis le feu » a ironisé Pascal, un des organisateurs du festival (et bassiste que je croise régulièrement à La Vache Rouge). En effet, une des friteuses a bien failli embraser le bâtiment en bois ! Les pompiers sont venus sur place et heureusement plus de peur que de mal.
Sanseverino, lui par contre, a bien mis le feu avec son concert du samedi soir…
Belle transition entre première et deuxième partie
Un concert qui a d’abord débuté avec Olga la rouge en première partie. Une artiste originaire du sud de la France qui a fait forte impression ce soir-là avec des textes bien écrits et des musiques qui oscillent entre rock et pop, riffs nerveux ou ballades atmosphériques. Mention spéciale aux trois musiciens qui étaient tous des remplaçants et ont maitrisé le répertoire en quelques jours. Pour faire la transition avec la tête d’affiche, la chanteuse a terminé son set par une reprise de Rouge Original.
Sanseverino en a été très touché et l’a remercié de cet honneur, tout en ironisant sur « le fric que ça allait lui rapporter ». Des bons mots il y en a eu à foison dans cette deuxième partie de soirée. Une interaction constante avec le public, une bonne humeur naturelle et un plaisir évident d’être sur scène. Et si on devait résumer la démarche de l’artiste, ce serait de ne jamais se prendre trop au sérieux… en témoigne cette introduction au son de… la musique des Dossiers de l’écran !
De l’électricité dans l’air…
Constamment sur le second degré, il lance-au public « Vous aimez le jazz, la bossa nova ?…. » avant de partir sur un riff tonitruant façon La Grange ! La tonalité générale du concert sonne très blues-rock, la nouvelle couleur musicale prise par Sanseverino depuis son album bien nommé Les deux doigts dans la prise, que j’avais chroniqué pour franceinfo. Celui qui auparavant affichait des influences plutôt jazz manouche n’hésite plus maintenant à enclencher la saturation et la wah-wah, ou à jouer en slide. L’inconditionnel de Django l’est tout autant de J.J. Cale… un musicien qui fait d’ailleurs l’objet d’une chanson, et qui prononcé à la française « sonne un peu comme Gigi l’amoroso »…
… et du rire en pagaille
Sanseverino aime improviser. Pas de représentation calculée, mais plutôt un lâcher prise (la même où il faut mettre les doigts dedans ?), et saisir l’inspiration comme elle vient. Comme il me le dira après le concert : « des fois on nous a proposé d’avoir un metteur en scène pour nos spectacles… mais casse-toi ! » ahah… tout le contraire d’un show millimétré à la Montand ou Aznavour, comme il aime à le répéter. Ici c’est du sans filet et ça part dans tous les sens.
Comme par exemple cette longue introduction surréaliste de L’étrangère… « une chanson composée par Léo Ferrat ou Jean Ferré je ne sais plus, et écrite par le poète Louis…Aragorn ! » Rires nourris dans la salle. « Mais si vous savez, Aragorn, celui qui joue dans le Seigneur des… agneaux !… à moins que ce ne soit le Silence des anneaux !… » une diatribe iconoclaste et so nonsense qui ferait passer Pierre Repp pour un orateur hautement intelligible. Sanseverino nous embarque dans son monde, et nous traduit le texte d’Aragon à sa manière pour nous en dévoiler le sens caché… moment cul-te !
Parmi les autres chansons non originales, on note Qui c’est celui-là ? de Pierre Vassiliu, une reprise qui figurait déjà sur Les deux doigts dans la prise, et Je voudrais être noir de Nino Ferrer en rappel.
Un power trio inventif
Mais on ne saurait réduire la soirée à ces quelques passages humoristiques. Le concert est surtout l’occasion d’apprécier une musique à la fois dynamique et inventive. Le power trio délivre du gros son mais pas trop fort, juste ce qu’il faut. Du riff, du groove, des solo, de l’impro, beaucoup de fins de morceaux nettes, tranchantes, brutes. L’esprit reste pur rock’n’roll, même quand le chanteur-guitariste se retrouve seul en scène pour une chanson.
Sanseverino change quelque fois de guitares : une SG pour le morceau-titre de l’album, une Telecaster qui se voit casser une corde, une custom noire, et deux modèles équipés avec 5 cordes en Open de Mi (« pour avoir un son plus massif, brut de décoffrage » m’explique-t-il après le concert) : La Grestch Gold top du début et la toute dernière à la forme Custom et aux couleurs de la paix en Ukraine.
Ce qui pourrait se cantonner à un blues-rock classique est en réalité grandement détourné par un jeu et un son très spéciaux du bassiste : ce dernier produit un son massif qui donne l’impression d’avoir une guitare rythmique. Il m’expliquera en fin de soirée qu’il utilise deux amplis avec deux sons distincts pour obtenir ce résultat. Si on y ajoute des effets peu courants pour une 4 cordes (une distorsion sur une basse j’avais déjà entendu, mais une whammy, jamais !), on arrive à des sonorités assez hallucinantes. Et rapidement dans le concert, le bassiste prend le devant de la scène. « D’habitude un solo de basse c’est à la fin et ben là c’est au début » lance Sanseverino. Et il aura même droit plus tard à chanter une de ses propres compositions. Le solo de batterie lui, interviendra à la fin du concert.
Deux invités pour le final
Une fin de concert qui apporte sa surprise tant espérée (et annoncée à demi-mot) : les deux guitaristes Norbert ‘Nono’ Krief et Patrick Rondat, qui avaient donné chacun une masterclass l’après-midi, viennent rejoindre leur pote Sanseverino sur scène pour interpréter Nénette. Un trio de six-cordes avec trois styles bien différents.
Je remarque instantanément que Nono joue sur sa toute nouvelle guitare qu’il avait présenté la veille sur les réseaux sociaux.
Des rencontres très sympathiques
Et après le concert j’ai pu justement en parler avec lui. Il m’a avoué qu’il aurait bien aimé passer une nuit avec cette nouvelle guitare (comme il l’a fait avec ses premières GIbson)… mais sa femme n’a pas voulu !
Ambiance détendue et très sympathique dans cet after-show, où on discute tous comme si on se connaissait depuis des années. Sanseverino nous parle de guitares, d’impro, de musique. Il se souvient même de Textes Blog & Rock’Roll ! Moment suspendu…
Une journée qui s’est terminée de la meilleure façon qui soit. Bravo à l’organisation du festival Koodshow qui avec son bureau historique de neuf personnes et sa cinquantaine de bénévoles a réalisé un évènement réussi. Vivement l’année prochaine !
© Jean-François Convert – Octobre 2023