Le 4 février 1977 arrivait dans les bacs ce disque qui allait devenir l’un des plus vendus au monde : ‘Rumours’ de Fleetwood Mac.
Sommaire
Un « nouveau » groupe
Un peu comme il y a eu deux Genesis, deux voire trois Pink Floyd, et carrément bien plus de Deep Purple ou de Yes, il y a eu au moins deux Fleetwood Mac. Mais pour le coup deux groupes vraiment différents.
À la fin des sixties, le quintet emmené par Peter Green est un des fleurons du british blues boom. Trois guitaristes (Green, Kirwan et Spencer) et une section rythmique qui donne son nom au groupe : le batteur Mick Fleetwood et le bassiste John McVie. La formation joue un blues-rock nerveux teinté de psychédélisme, typique de la scène britannique de l’époque. Pas étonnant quand on sait que Green et McVie proviennent des Bluesbreakers de John Mayall, formidable vivier de talents durant les sixties londoniennes.
Mais en 1970, Peter Green quitte brutalement le groupe suite à des symptômes de schizophrénie, dus sans doute à la trop grande consommation de LSD liée à la difficulté de gérer la célébrité soudaine. Une histoire qui n’est pas sans rappeler celle de Pink Floyd. On pourrait dire que Peter Green est en quelque sorte le Syd Barrett de Fleetwood Mac…
S’ensuivent quelques années où le groupe connait la défection des deux autres guitaristes, et plusieurs changements de musiciens : Bob Weston, Bob Welch, Dave Walker… et surtout l’arrivée en 1971 de Christine Anne Perfect, qui devient Christine McVie en se mariant au bassiste.
Puis en 1975, le trio constitué de Fleetwood et du couple McVie part s’installer au Etats-Unis où ils sont rejoints par les californiens Lindsey Buckingham (guitariste et chanteur) et Stevie Nicks (chanteuse). Couple à la ville et sur scène, le duo a déjà sorti un album en 1973, et va propulser Fleetwood Mac dans une autre dimension.
Cette nouvelle formation de Fleetwood Mac est la plus célèbre, en tout cas celle qui a connu le plus de succès. Déjà leur premier opus éponyme de 1975 marche bien, mais le suivant va dépasser toutes espérances. En 1977, Rumours provoque un véritable raz-de-marée dans le monde de la musique, et reste encore aujourd’hui un des albums les plus vendus au monde : 40 millions d’exemplaires, dont vingt rien qu’aux États-Unis, écoulés depuis sa sortie.
Crises conjugales en série…
Les membres du groupe reconnaissent que le tumulte de leurs vies personnelles des années 1975 et 1976 explique en bonne partie la dynamique et la créativité qui allait mener, au lieu de l’éclatement de la formation, à la naissance de Rumours. En effet, en l’espace d’environ un an, pendant l’enregistrement de cet album, les cinq membres du groupe se sont séparés : Buckingham et Nicks, Christine et John McVie, mariés depuis huit ans, et le batteur Mick Fleetwood et sa femme (cette dernière ne faisant pas partie du groupe).
Wikipedia
Tout est dit. Les sessions d’enregistrement sont le théâtre de déchirures internes qui ont participé à la légende du groupe et de l’album. Et la campagne promotionnelle en joue bien malicieusement, notamment par une photo restée célèbre, ayant fait la couverture du magazine Rolling Stone. On y voit le quintet dans un grand lit avec deux couples enlacés : Buckingham et Christine McVie d’un côté, et Fleetwood et Stevie Nicks de l’autre, tandis que John McVie se retrouve à l’écart. Les photos prises pour la pochette du disque ont elles aussi alimenté les « rumeurs » (titre de l’album) sur une liaison entre Stevie Nicks et Mick Fleetwood.
…et drogue à foison
L’autre élément incontournable ayant sévit pendant cette période est la prise continuelle de cocaïne par les membres du groupe. À un point tel qu’ils envisagent de citer leur dealer sur les notes de pochette ! L’idée ne sera pas finalisée pour la simple et bonne raison que le fournisseur de coke se fait descendre dans un règlement de comptes de gangs avant la sortie du disque !
En revanche, si la drogue n’apparait pas explicitement, l’alcool est bien présent sur les différentes photos intérieures de l’album. Une composante qui faisait déjà partie de la vie du couple McVie dans la première moitié des seventies.
Détail surprenant : sur les notes de pochette, l’édition CD (ci-dessous à droite) omet de mentionner Christine McVie au chant, alors qu’elle apparait bien sur l’édition vinyle originale ( ci-dessous à gauche).
Elle chante pourtant la voix lead sur 4 titres (Don’t stop, Songbird, You make loving fun et Oh Daddy), soit plus du tiers de l’album, sans compter qu’elle est aux chœurs sur les autres morceaux.
Un parfait équilibre
C’est ce qui fait la force de ce nouveau Fleetwood Mac : l’équilibre entre les trois songwriters que sont Buckingham, Nick et McVie. Chacun et chacune prend les feux de la rampe à tour de rôle en écrivant et composant, et en chantant la voix principale. Le groupe ne s’identifie ainsi pas à un seul leader, mais à un collectif qui apparait soudé, malgré les dissentions sentimentales en coulisses.
Et un morceau phare du disque est même l’œuvre des 5 membres : The chain, déjà un tube à l’époque et qui en plus a connu un regain d’intérêt récemment par son insertion dans la Bande originale du film Les gardiens de la Galaxie. Mais dès les concerts de 1977, il suscitait déjà l’engouement du public.
Des tubes et des morceaux cultes
Outre The chain et son riff obsédant, Rumours regorge de tubes qui ont propulsé l’album et le groupe aux sommets des charts : Go your own way, Don’t stop, Second hand news, You make loving fun, I don’t want to know…
Parallèlement à ces mélodies et rythmes enlevés se côtoient des ambiances plus intimistes ou mélancoliques comme Dreams (que Rick Beato a listé dans son top 3 des plus belles chansons à 2 accords), Oh Daddy, ou la superbe ballade Songbird enregistrée dans l’auditorium de l’université de Berkeley. La guitare acoustique discrète de Buckingham prenait plus de place en concert dès la tournée 1977 :
Et en matière de guitare, Lindsey Buckingham possède un style vraiment particulier, en jouant aux doigts et le plus souvent sur des modèles custom dont la fameuse Rick Turner Model 1 au micro rotatif permettant d’utiliser toutes les composantes harmoniques des vibrations des cordes.
La chanson de l’album qui m’a fait instantanément aimé le style du groupe est Never going back again. Une ritournelle en picking à la guitare acoustique, doublée sur l’enregistrement studio, mais que Buckingham interprète forcément en solo pour les prestations live. Sur cette version plus récente, il ralentit le tempo et s’écarte du leitmotiv :
Les deux plus belles chansons de Rumours à mon goût, même si tout l’album dans son intégralité se savoure encore et toujours après de multiples écoutes. Un album sorti il y a 45 ans aujourd’hui.
© Jean-François Convert – Février 2022
Tres bon travail !!! j adore votre article .
merci beaucoup 🙂