Avant-hier je suis allé voir le documentaire de Nick Broomfield sur Brian Jones.
La première impression en entrant dans la salle c’est qu’il y avait beaucoup, mais alors vraiment beaucoup moins de monde moins que pour la projection de Becoming Led Zeppelin. A peine 10 personnes ! Il faut préciser que cette projection n’était pas unique et que le film sur Brian Jones est sorti il y a plus longtemps.
Le documentaire sur Led Zeppelin se concentrait sur la naissance et l’essor du groupe, celui-ci s’attache à la personne de Brian Jones et donc évoque aussi forcément les débuts des Rolling Stones. Certaines images sont déjà très connues comme le fameux concert aux Pays-Bas en 1964 où le public s’est déchainé, faisant même battre en retraite les forces de l’ordre sur la scène :
D’autres séquences moins célèbres sont bizarrement inversées visuellement, on voit ainsi Brian Jones tenir sa guitare comme s’il était gaucher, ce qui n’est évidemment pas le cas. Quelques infos choc alimentent cette période, comme par exemple le fait que les Stones ont joué 300 concerts rien que sur l’année 1963 ! Et d’ailleurs dans les dates qui sont affichées j’ai noté une erreur : le show Rock’N’roll Circus est indiqué en 1967, alors qu’il a été filmé les 11 et 12 décembre 1968… étonnant pour un documentaire de ce niveau, sortant en salles…
Mais c’est avant tour l’histoire et la personnalité de l’ange blond qui sont au centre du film, plus que le devenir du « plus grand groupe de rock n roll du monde » qu’il a contribué à fonder. L’accent est mis sur le rejet de ses parents, et sur son humeur changeante. Le sentiment d’un désamour familial, suivi par une difficulté à absorber la célébrité soudaine, combinée au complexe d’infériorité de ne pas savoir composer à la différence de Mick et Keith… ceux-là même qui vont finir par le mettre progressivement à l’écart…
D’ailleurs, même si les deux témoignent dans le film, ce n’est qu’en voix off. Le seul qu’on voit interviewé à l’écran c’est Bill Wyman. Le discret bassiste ne tarit pas d’éloges sur Brian, ses talents de multiinstrumentiste surtout : la slide sur Little Red Rooster, la flute sur Ruby Tuesday, le sitar sur Paint it black, le saxophone sur You know my name des Beatles… comme le dit une de ses nombreuses petites amies, la chanteuse, actrice et mannequin française Zouzou : « Brian était un fan des Beatles ! Je n’ai jamais entendu un seul disque des Stones chez lui !«
Et Wyman aborde un sujet visiblement « secret »… embêté, il se tourne vers une personne hors-champ pour savoir s’il est autorisé à en parler… Brian Jones et Jimi Hendrix avaient un projet de jouer ensemble, ils avaient travaillé sur un morceau mais ne l’ont jamais finalisé. Cette histoire n’est pas réellement « inédite » et déjà connue des fans du divin gaucher. La chanson en question s’appelle There ain’t Nothing Wrong ou Little One selon les sources et est en fait une composition de Noel Redding qui la chante. Sauf que contrairement aux infos qui circulent sur Internet, Brian Jones NE JOUE PAS sur la version enregistrée, pour la simple et bonne raison qu’il était en vacances à ce moment là. C’est Dave Mason qui assure le sitar en plus de la basse, Mitch Mitchell est à la batterie, et Jimi Hendrix à la guitare. Il est surprenant que le documentaire présente ce non évènement comme un scoop !
Outre les membres du groupe ou de sa famille, peu de célébrités interviennent. On note le chanteur Eric Burdon et le réalisateur Volker Schlöndorff. Ses petites amies encore vivantes ont également la parole à plusieurs reprises, ainsi que l’acteur Freddie Fox ou même le réalisateur lui même, Nick Broomfield.
Beaucoup d’images sont rares voire carrément inédites. Des archives familiales aux clichés backstage, on entre un peu dans l’intimité du musicien. Bien que connaissant déjà pas mal l’histoire des Stones et de la musique anglaise de cette époque en général, j’ai appris plusieurs choses, par exemple que la chanson des Beatles A day in the life faisait référence à Tara Browne, un grand ami de Brian.
Quant au passage sur sa mort, il ne fait nullement allusion à aucune des théories fumeuses entourant les mystérieuses circonstances du drame. Le propos préfère rester dans l’hommage digne, et c’est tout à l’honneur du film. Pour ce qui est du tristement célèbre « Club des 27 », n’oublions pas que Brian Jones n’en est pas « l’inaugurateur » comme il est souvent dit, puisqu’il y a eu avant lui le mythique bluesman Robert Johnson. En revanche, le Rolling Stone en a été la première pop star et son décès marque à coup sûr la fin d’une époque, celle du swinging London.
Le fameux concert à Hyde Park est présenté comme « les funérailles des sixties » (même si on pourrait arguer que le festival d’Altamont est un sérieux concurrent en la matière), et le documentaire se referme sur un épilogue très émouvant avec la lecture d’une lettre écrite par le père de Brian, où il exprime ses regrets., notamment de l’avoir renvoyé du foyer familial.
Le générique de fin conclut en disant que Brian Jones a contribué à créer le « plus grand groupe de rock n roll du monde », avec en fond sonore la cultissime chanson de Muddy Waters ayant inspiré le nom des Rolling Stones…
© Jean-François Convert – Mars 2025