Avant-hier soir, Ganafoul avait choisi le Festival rock de Communay pour rejouer ensemble la première fois depuis 41 ans.
Le groupe Ganafoul originaire de Givors près de Lyon a connu un succès plus que d’estime à la fin des années 70. En juin de l’année dernière, Jack Bon nous annonçait en avant-première la reformation de ce pilier de la scène blues-hard-rock hexagonale. Après l’annulation des dates avec Bijou prévues en février, Ganafoul s’est finalement reformé et est remonté sur scène avant-hier pour la première fois depuis 4 décennies. C’était au Festival rock de Communay, dans la région lyonnaise qui a vu naitre le groupe en 1974.
Sommaire
Un festival qui renait après 2 ans d’interruption
La crise sanitaire a eu des répercussions violentes sur le milieu du spectacle vivant, et les différentes structures culturelles, notamment celles de festivals, ont dû braver deux années très difficiles. Pas toujours évident de maintenir le cap. La reprise des concerts en est d’autant plus vécue comme une renaissance à savourer sans modération. Les deux organisateurs du Communay Rock Fest Marc et Sophie n’ont pas caché leur émotion et leur plaisir de retrouver enfin le public, venu nombreux.
La soirée d’avant-hier était un avant-goût du festival qui se jouera en plein air en juillet prochain, avec deux dates les 22 et 23 et pas moins de 7 groupes. Oui, le Communay Rock Fest est de retour !
Soirée revival
Mais avant de goûter aux joies des concerts en extérieur cet été, ce 2 avril marquait le tout premier concert à Communay depuis deux ans. Après ces longs mois d’attente, il fallait du rock’n’roll puissant pour raviver la ferveur du public. Alors quoi de mieux qu’un trio de groupes au son charpenté et cossu ?
Avec cette affiche du samedi 2 avril à Communay, c’était entrée – plat – dessert ! Et celles et ceux qui me connaissant savent que j’ai une forte préférence pour le sucré…. Le final d’avant-hier était jouissif, tel un banana split des années 80. Car oui, c’est bien 40-45ans en arrière, voire plus, qu’on s’est retrouvé avec la musique de Ganafoul. Et les deux groupes qui l’ont précédé ont joué une musique qui fleurait bon les seventies et eighties. Quant à la sono qui diffusait du Creedence Clearwater Revival pendant les intermèdes et changements de scène, le choix du groupe avec son nom caractéristique ne pouvait pas mieux être en phase avec l’esprit de la soirée.
Mise en bouche avec Nasty Buffalo
On démarre sur une formule classique : chant, deux guitares, basse, batterie. Du blues-rock au gros son, avec Telecaster en lead et Stratocaster en rythmique (occasionnellement en lead). Des riffs carrés et efficaces, du son brut et rugueux, Nasty Buffalo a donné l’ambiance dès les premières notes, qui plus est après un décompte pour lancer cette résurrection tant attendue du Communay Rock Fest
Coup du milieu avec Froggy Style Band
La couleur sonore se fait légèrement plus moderne avec l’arrivée de Froggy Style Band. Déjà, l’ajout du clavier, en mode Fender Rhodes ou Hammond B3, apporte des ambiances plus soul et Rhythm and Blues. La guitare affiche des sonorités plus eighties avec beaucoup de reverb, et l’ensemble s’aventure parfois dans des ambiances légèrement pop. Une atmosphère différente qui a permis à la soirée de s’inscrire dans une dynamique musicale et d’offrir des styles différents tout en restant voisins.
Explosion des papilles avec Ganafoul
Une formule inédite
Après l’installation des instruments avec Brothers in arms et Money for nothing en fond sonore (pourtant je n’avais rien demandé !), les tant attendus Ganafoul montent enfin sur scène. Une formule inédite puisqu’il s’agit d’un quatuor à mi-chemin entre le quintet des débuts et le power-trio qui a connu le succès à la fin des seventies. On retrouve ainsi Jack Bon au chant et à la guitare, Yves Rotacher à la batterie et aux chœurs, Edouard ‘Doudou’ Gonzales à la deuxième guitare, et Luc Blackstone à la basse et au chant.
Jack Bon ne manque pas de citer dès le début du set Jean-Yves Astier qui a été le bassiste historique et le tout premier chanteur-parolier du groupe, mais parti depuis « s’installer dans les îles, là où le soleil est chaud et l’alcool aussi ». Juste avant le dernier morceau, il nous a également rappelé les noms de ceux qui ont participé à l’aventure Ganafoul et qui sont aujourd’hui disparus, à commencer par le premier bassiste : Philippe Veau, surnommé ‘Fourmi’. Et il a remercié au passage Yves et Edouard d’avoir fondé le groupe. C’était en 1974 à Givors, Jack Bon les a rejoint en 1975. Et il y a un an et demi, leur tout premier enregistrement a été réédité par le label Simplex Records.
Paix, amour et Rock’n’roll
De ce premier disque, Ganafoul interprète Zone interdite sur scène. Ce sera le seul titre en français de la soirée, « notre quart d’heure poétique » ironise Jack Bon. Le reste de la setlist envoie du lourd avec les titres incontournables du groupe, dont entre autres : Let Me Burn (premier morceau du premier album), Full Speed Ahead, et bien sûr Saturday Night, le bien nommé pour ce samedi soir.
Mais comme « la musique de Ganafoul puise ses racines dans le blues » dixit Jack, le groupe emprunte également au répertoire des Buzzmen, le dernier combo du chanteur-guitariste, notamment avec la reprise de Robert Johnson Stop Breaking Down, ou l’hymne que le monde entier devrait suivre : Peace, Love, Rock’n’roll, titre de l’album des Buzzmen.
Et comme il le dira à la fin sur la reprise de Chuck Berry, Don’t you lie to me, Jack rappelle l’essence même de cette musique :
« c’est que 3 accords mais c’est tout une science ! »
Guitares en fusion et rythmique en acier trempé
Forcément dans ce style de musique, les guitares sont aux premières loges. Après avoir joué seul pendant des années, Jack retrouve ici son compère des débuts en la personne d’Edouard ‘Doudou’ Gonzales. Les deux guitaristes prennent un plaisir évident à jouer et à s’échanger les solos. Deux Stratocasters avec l’ampli monté jusqu’à 11.
Quand j’avais vu Jack au festival des Grosses Guitares en septembre dernier, je lui avais dit : « si tu reformes Ganafoul, tu vas être obligé de ressortir ta Strat ! » Très porté sur le blues depuis quelques décennies maintenant, le guitariste optait plus souvent pour sa Les Paul Junior, ou d’autres guitares typiquement bluesy. Mais avant-hier, il a brandi à nouveau sa Stratocaster sunburst légendaire, celle qu’on peut voir sur le live historique à l’émission Chorus, bien que modifiée avec maintenant plus qu’un seul micro. Un peu comme une Les Paul Junior finalement.
Et justement, le style guitaristique de Jack va droit à l’essentiel : un seul micro suffit, très peu d’effets. Simple mais terriblement efficace. Edouard complète parfaitement l’espace sonore soit par des rythmiques bien carrées ou des interventions solo qui tombent pile poil au moment où on les attend.
Yves Rotacher semble avoir retrouvé plus d’assurance qu’en septembre dernier, où il avait dû reprendre la place de batteur au pied levé. Cette fois, il chante même les chœurs en jouant, et la frappe est précise en même temps que puissante.
De son côté, Luc Blackstone continue d’assurer une base à la fois solide et groovy et chante même le lead sur un morceau :
Plaisir communicatif et final joussif
On ne le répétera jamais assez, mais voir ces quatre là prendre du plaisir à jouer est instantanément contagieux. L’ambiance est détendue et bon enfant, Jack plaisante entre les chansons, certains dans le public connaissent les paroles par cœur, et il n’y a bien que les musiciens pour être surpris d’un tel engouement. Je lis souvent des commentaires des quatre coins de la France : « ah Ganafoul, mon adolescence ! comme j’aurais aimé venir au concert ! » On sent vraiment un lien affectif très fort entre le public et ce groupe.
D’ailleurs les gens présents avant-hier à Communay ne s’y sont pas trompés. À la fin du set prévu, le groupe a préféré ne pas mimer un « faux rappel » attendu : « On fait semblant de partir et vous nous rappelez? » lance Jack sans quitter la scène puis en enchainant directement sur le morceau « de rappel ». Mais après cette chanson et avoir quitté réellement la scène, le quatuor a bel et bien été rappelé, à tel point que notre Yves de batteur a dû reprendre les baguettes qu’il avait jetées dans le public !
Et Jack termine le concert par une boutade, un peu à la John Lennon façon Rooftop concert :
« Pour un jeune groupe c’est très encourageant ! »
La moyenne d’âge du public dépassait sans doute allégrement les 6 décennies, voire plus. Mais on a pu croiser tout de même des jeunes voire très jeunes… peut-être même les petits enfants de celles et ceux qui écoutaient Ganafoul à leur adolescence.
En témoigne une petite note de tendresse avant le début des concerts : une dame explique à l’un de ses petits-enfants en montrant la scène, « tu vois c’est là qu’il va jouer papy »… oui il y a eu sans doute plusieurs grands-pères qui sont montés sur scène ce samedi 2 avril, et on peut dire qu’ils ont enflammé la salle de Communay. Les jeunes musiciens débutants peuvent en prendre de la graine.
Il n’y a décidément pas d’âge pour jouer du rock’n’roll.
© Jean-François Convert – Avril 2022
Vidéos Multi-cams
Retrouvez les vidéos multi-cams filmées par Arno Roche et enregistrées par Jean-Olivier Païssé :
Revenez en Loire Atlantique, je n’ai que de bon souvenirs de votre passage à Carquefou. A bientôt peut-être.
Love, freedom and rock and roll.
Beautiful.
un grand merci pour ce passionnant article …sur le grand retour de ganafoul.on voit tout de suite que tu aimes partager ta passion .pour ma part j’ai aussi connu la grande époque de ganafoul (eh oui je suis pas si jeune)et pour moi cette soirée était exceptionnelle ,du fait qu’à partir de 77 j’étais fan et debout sur les barrières et +de 40 ans après ,j’ai l’honneur d’ouvrir la soirée du rockfest pour Ganafoul !! un grand merci PACO (guitariste rythmique des NASTY BUFFALO)
Merci pour cet article qui résume parfaitement l’atmosphère de cette soirée. Sophie COMMUNAY ROCK FEST