Le 2 octobre 1989 sortait Freedom, l’album du grand retour de Neil Young, après des eighties un peu difficiles.
Sommaire
Après les années 80 en demi-teinte, le retour
En 1989, Neil Young n’est plus franchement à la mode. Après Re-ac-tor avec Crazy Horse en 1981, les années 80 sont sa période avec le producteur David Geffen, que le loner qualifie lui même d’ère du « n’importe quoi ». Des albums boudés par le public et la critique : de l’électronique Trans (1982) au country Old ways (1985), en passant par le rockabilly Everybody’s Rockin’ (1983) et les hargneux Landing on Water (1986) et Life (1987), Neil Young se détache de la musique pour mieux se consacrer à son deuxième fils handicapé. Cette période correspond également à son soutien à Ronald Reagan dont il ne s’expliquera jamais très clairement.
Mais Freedom va le remettre en selle et marquer un retour aux sources. Il quitte Geffen et retourne à son label fétiche Reprise. 10 ans après Rust never sleeps, il sort un recueil de 12 chansons du même acabit, entre grunge rageur et folk bucolique.
Acoustique et électrique
Tout comme son illustre prédécesseur, Freedom débute par un morceau en acoustique, qui est repris en clôture de l’album, mais en version électrique saturée : Rockin in the free world (joué entre autres au concert de soutien à Nelson Mandela en 1990)
Et c’est cette dualité si représentative de la discographie de Neil Young qui s’exprime sur cet album. Mais au lieu de proposer deux faces bien séparées pour chacune des couleurs musicales comme sur Rust never sleeps, c’est au contraire une constante alternance entre violence brute et douceur mélodique qui rythme Freedom :
On passe des déflagrations sonores de Don’t cry aux harmonies vocales de Hangin’ on a limb, du classique On Broadway des Drifters ou George Benson, revisité façon grunge, à Wrecking ball et sa mélancolie presque jazzy.
Et parfois à l’intérieur d’un même morceau, on perçoit cet équilibre fragile entre sérénité et pulsion dévorante : les apparemment calmes Eldorado et Crime in the city laissent poindre par petites touches une urgence, une colère, une force, qui s’expriment à travers la guitare qui peut soudainement transformer les gémissements en cris, sans prévenir. C’est là qu’on mesure tout le talent guitaristique de Neil Young : pas d’esbroufe, pas de démonstration technique, mais une maitrise du volume, de la saturation, qui lui permet de passer d’une couleur quasi-claire à un larsen assourdissant dans une même mesure.
Un folk-country-rock typique de Young
Dans un esprit similaire, l’artiste canadien a le don de mixer un son de guitare grunge dans une ambiance de ballade folk-rock, et tout ça semble naturel. Too far gone ou No more pourraient sembler de prime abord appartenir au registre country ou apparenté, mais c’est sans compter la guitare rageuse du Loner qui vient perturber la quiétude bucolique par un son tranchant et abrasif.
Après des eighties où le chanteur-guitariste s’est essayé à différents styles, cet album est un vrai retour à ses premières amours, et ce qui caractérise le mieux sa musique : ce mélange de folk, de rock, de country, d’énergie et de douceur.
L’aspect mélodique est renforcé par les chœurs de Linda Ronstadt sur les magnifiques ballades Hangin’ on a limb et The ways of love. Bien que la seconde guitare soit assurée par Franck Sampedro, le groupe n’est pas Crazy Horse, mais composé du bassiste Rick Rosas (avec qui Young forme le duo de producteurs “The Volume dealers”) et du batteur Chad Cromwell, bien connus des fans de Mark Knopfler. On retrouve également Ben Keith à la pedal steel, membre éminent des Stray Gators, qui accompagnaient Neil Young sur le mythique Harvest en 1972.
Et s’il y a un morceau qui se détache un peu du reste de l’album en terme de couleur musicale, c’est ce Someday, qui navigue entre country et cuivres soul. Le piano qui donne une saveur presque cinématographique, des chœurs qui donnent l’impression d’être dans un western, un saxophone qui semble égaré des années 80 au milieu d’une ballade folk-rock…
…Une chanson un peu inclassable qui représente bien l’univers musical de Neil Young : à la croisée des genres.
Et chose surprenante, c’est le seul titre de Freedom que Neil Young jouait lors de sa tournée 2016, avec Promise of the Real. Une façon d’honorer cet album, qui bien qu’aujourd’hui trentenaire, n’a pas pris une ride.
© Jean-François Convert – Octobre 2019
Un de mes albums préférés ….. là où l’électrique rejoint l’acoustique….. Un guitariste au sommet de son art …. lequel atteindra les sommets dans la BO du film de Jim Jarmusch «Dead man « ……😇
ah oui j’adore Dead man aussi. le film et la BO