Bette Smith, The Supersoul Brothers, The Tibbs et Cyril Amourette nous offrent des disques ensoleillés pour accompagner cette période estivale où la musique se fait aussi chaude que la météo.

Bette Smith – ‘Goodthing‘

Avec sa voix impertinente et torride, Bette Smith s’inscrit dans la lignée des grandes voix du blues et de la Soul made in Brooklyn, à la croisée des styles soul, rock & roll, funk, et blues sans oublier le gospel qui a bercé sa jeunesse à Brooklyn. « C’était culturellement très vivant et ça l’est toujours. Il y avait beaucoup de fêtes de quartier en été avec des groupes de Memphis et du Mississippi et nous les filles noires, on accompagnait ces groupes » raconte-t-elle.

Pour réaliser son nouvel album « Goodthing » Bette s’est rendue au Royaume-Uni et a collaboré avec le producteur Jimmy Hogarth, lauréat d’un Grammy Award (Amy Winehouse, James Blunt,  Corinne Bailey Rae, Tina Turner). Hogarth atteste « Bette c’est le vrai truc. Ses paroles viennent directement du cœur. Elle emporte les gens avec sa voix unique et j’ai été ravi de travailler sur ce disque ». Ensemble ils ont créé une collection de morceaux fascinants entre le sanctuaire de Jimmy à Londres et celui de Bette à Brooklyn qui est le fruit d’une synergie créative. 

Le morceau-titre ouvre l’album sur un riff entêtant entre blues, funk et rock :

Héritière de Big Mama Thorton et de Koko Taylor, Bette Smith n’a rien à envier à ses illustres aînées. Le magazine anglais Mojo ne tarie pas d’éloge à son sujet en la qualifiant de « la prochaine sensation soul de Brooklyn ». Sur les 13 titres qui composent l’album, on navigue entre différentes ambiances qui invitent soit à al dépense d’energie ou au contraire au farniente. Aux riffs rugueux et bluesy se côtoient des ballades sexy comme le très beau Eternal Blessings :

The Supersoul Brothers – ‘By The Way’

Découverts pour ma part en 2021 avec leur premier album Shadows & Lights et un concert mémorable, les Supersoul Brothers perpétuent cet esprit de southern soul façon Stax. Ce nouvel opus By the way sorti en mai chez Dixie Frog donne des frissons et des fourmis dans les jambes dès l’ouverture Toy party time. Un morceau comme Gimme Some Soul dit tout dans son titre, et les chansons s’enchainent sans temps mort. La guitare se fait bluesy (By the way, Gimme some soul, Father), funky (Snow day in the world, Take my hand) ou jazzy (Time is right), le clavier subtil et élégant (superbe solo de piano électrique sur By the way, orgue rageur sur Heart made of stone), les cuivres sont toujours brûlants, et les voix on ne peut plus habitées (les intros de Heart made of stone ou Play it like a sister), le tout sur une rythmique constamment endiablée (Where are you, Yeah!Yeah!Yeah!), mais qui ne s’interdit pas des intermèdes langoureux (le poignant Father, les sensuels Snow day in the world et One more day).

Quant au morceau-titre, il baigne dans une atmosphère fiévreuse en alternant couplets tout en retenue et refrains emphatiques. Une synthèse à lui tout seul des déférentes émotions que procure al musique des Supersoul Brothers. Un groupe à voir en live bien sûr comme en témoigne l’album The Road To Sound Live sorti l’année dernière.

The Tibbs – ‘Keep It to Yourself’

Paru plus tôt dans l’année (en janvier) le troisième album studio des Tibbs Keep it to yourself (chez Record Kicks) est leur deuxième avec la chanteuse Roxanne Hartog, après le départ d’Elsa Bekman fin 2018. Originaire des Pays-Bas, le groupe voue un culte à la soul et au funk et met l’accent sur les cuivres. A l’image du premier single Ain’t It Funny, un morceau survolté qui donne le ton pour tout l’album.

Les 12 titres nous plongent immergent dans un pays des merveilles poétique et sondent les profondeurs de l’amour et ses déboires, tout en mettant l’accent sur les inégalités sociales d’actualité et l’urgence de veiller sur la planète. Les oucleurs musicales oscillent entre inspiration funk (Can’t Teach an Old Dog New Trick), ballade émouvante et poignante qui fait la part belle à la voix de velours de Roxanne (In Orbit), instrumental en hommage aux classiques des sixties avec toute la puissance de l’orgue Hammond (Chicken Bones), ou groove au ternaire rapide, à la fois énergique et dansant (Give me a reason).

Cyril Amourette – ‘Instant Groove’

Un titre qui porte bien son nom, car le groove est le maitre mot des 9 titres de cet album de jazz funk instrumental réalisé par le compositeur Cyril Amourette. Même si on pourrait le catégoriser plus en jazz-rock, la couleur soul-R&B est bien pérsente et domine la couleur musicale de l’album. Le single Sidney’s Glasses qui ouvre le disque affiche instantanément ce feeling détachée et tellement jouissif. La Telecaster et son humbucker en position manche offrent cette tonalité jazzy immédiatement reconnaissable.

Le Sidney du titre du morceau est tout simplement Sidney Regal, tête pensante du label Black Stamp Music, et qui a co-produit l’album. La rencontre entre Cyril Amourette et Sidney Regal date d’il y a quelques années lorsqu’ils avaient collaboré ensemble pour le premier album des Soul Jazz Rebels et qui les avait déjà conduits jusqu’au Festival de Marciac.

Leur passion commune pour le Groove, l’Afrique, l’Amérique latine, la Pop, le Cool, les a tout naturellement poussés à cette fusion des genres qui donne cette atmosphère chaude et positive. Le morceau-titre fait la part belle à la wah-wah, tandis que Narvalo Spring met en valeur la batterie, ou que Until Dawn referme l’album de façon épique en dépassant les 11 minutes. Quant à Hot Summer qui nous parle de fortes températures, pourquoi ne pas l’écouter en sirotant un bon cocktail ?

C’est bien là le point commun qui se dégage de ces quatre disques : une atmosphère estivale gorgée de soleil, de chaleur, de rythmes et de sensualité. La musique soul offre cette sensation indéfinissable qu’on nomme le groove. Laissez-vous bercer.

© Jean-François Convert – Août 2024