Le 25 juin 1984 arrivait dans les bacs ce neuvième album de Mike Oldfield. Pour ma part c’est le dernier que j’apprécie pleinement. Après, j’avoue avoir un peu décroché.
En 1984, Mike Oldfield a déjà une carrière solo de plus de 10 ans depuis la sortie de Tubular Bells en 1973. Après des albums instrumentaux très progressifs durant les seventies (Tubular Bells, Hergest Ridge, Omadawn, Incantations), il avait déjà amorcé un premier virage en 1979 avec Platinum en combinant longues pièce instrumentale (le morceau-titre) et chansons plus courtes. Une formule qu’il a renouvelée sur Q.E.2, Five Miles Out, puis Crises.
Mais sur Discovery, il accentue encore plus cette tendance en inversant la balance : désormais, les chansons occupent la majorité de l’album, et un seul instrumental vient clore le disque. Sur certaines éditions, il est d’ailleurs partie prenante du titre de l’album, qui se nomme parfois Discovery And The Lake :
Avant d’entendre ce morceau d’une douzaine de minutes, on a d’abord sept chansons qui sonnent très pop, certain-e-s diraient « commercial », en tout cas au format parfaitement adapté pour les radios FM. Et le titre d’ouverture To France est d’ailleurs un des grands succès de la carrière de Mike Oldfield, juste derrière Moonlight Shadow, avec encore la voix claire de Maggie Reilly :
Le talent de Mike Oldfield pour les mélodies accrocheuses transpire dans chacune de ces chansons, qui alternent voix féminine et masculine. Après Maggie Reilly, c’est Barry Palmer qui tient le micro. Cet ex-chanteur du groupe progressif allemand Triumvirat arrive à mêler rugosité et envolée dans les aigus.
Les deux vocalistes se rejoignent sur Tricks of the Light, autre ritournelle entêtante sortie également en single et qui a aussi connu son heure de gloire, même sans atteindre le degré de popularité du hit To France. Pour l’anecdote, bien qu’il s’agisse d’un duo (rare chez Oldfield), les prestations de Maggie Reilly et de Barry Palmer ont été enregistrées à part.
Tout au long des morceaux, Mike Oldfield mixe sonorités claires très typées Strat (Crystal Gazing, Talk About Your Life, le solo de Tricks of the Light, la rythmique de Poison Arrows) voire acoustique (le solo de To France sur Ovation Adamas) avec du gros son saturé, le plus souvent sur SG (solo de Poison Arrows, thèmes de To France et Tricks of the Light, notes aériennes de Saved by a Bell). C’est ce deuxième style qui prédomine sur le morceau-titre au riff pesant.
Mais Oldfield n’est pas que guitariste. Il joue de tous les instruments (guitares, basse, claviers…) exceptés la batterie assurée par Simon Phillips. Ce dernier était déjà présent sur Crises, mais ici, il coproduit l’album avec Mike. A la fois à la composition, à l’écriture, à presque tous les instruments, et aux manettes de la console, le musicien multi-casquettes garde sa méthode de chef d’orchestre qui lui a donné son succès depuis ses débuts.
L’album est enregistré en Suisse, principalement pour des raisons fiscales. mais le panorama qui s’offre à la vue depuis le studio donne aussi lieu à l’inspiration, notamment du dernier morceau. « enregistré dans les Alpes Suisses à 2000m d’altitude avec vue sur le lac Léman les jours ensoleillées » stipulent les notes de pochette. Effectivement, el bien nommé The Lake suggère des images d’un paysage féérique. Des envolées lyriques comme on les aime chez Mike Oldfield, des guitares qui vont du cristallin à la saturation grasse en passant par l’acoustique, des nappes de claviers imposantes, et un sentiment de voler au dessus des montagnes pendant un lever de soleil.
A l’inverse de ce à quoi Mike Oldfield nous avait habitué dans plusieurs albums précédents, Discovery s’ouvre sur un tube et se referme sur cette petite symphonie pop-rock au décor pastoral. Pour moi, The Lake apporte la note finale à l’âge d’or de l’artiste, en tout cas celle que je ne me lasse pas d’écouter. Cet album qui clôt ma période musicale préférée de Mike Oldfield sortait il y a tout juste 40 ans aujourd’hui.
© Jean-François Convert – Juin 2024