Il y a 30 ans, Eric Clapton renaissait en acoustique

Le 16 janvier 1992 est filmé et enregistré le concert d’Eric Clapton sur le plateau de MTV, qui sortira fin août de la même année dans la célèbre série ‘Unplugged’.

Un retour à la vie

Le 20 mars 1991, Eric Clapton perd son fils Conor, âgé de 4 ans et demi, qui tombe d’un balcon. Le chanteur-guitariste venait de revenir sur le devant de la scène avec son album Journeyman en 1989, suivi d’une tournée immortalisée par le live 24 nights. Sa première réapparition dans le monde de la musique après ce drame intervient au début de l’année suivante. La chaine MTV l’accueille sur son plateau le 16 janvier 1992 pour l’enregistrement en public de son émission Unplugged.

L’audience découvre un nouveau Clapton portant lunettes et le cheveu plus court que pour les concerts au Royal Albert Hall en 1990 et 1991. Il interprète notamment Tears in heaven en hommage à son fils disparu.

La chanson figure sur la BO du film Rush, et le single parait ce même mois de janvier. Mais l’album Unplugged ne sortant que fin août, et la première version publique à la télé pour l’interview par Sue Lawley n’étant diffusée que le 25 février, on peut supposer que le public présent lors de cet enregistrement le 16 janvier entend Tears in heaven pour la toute première fois.

Une formule à succès

MTV a débuté sa série de concerts « débranchés » en 1989 avec Bon Jovi. La formule fait les beaux jours de la chaine au début des nineties, et plusieurs albums issus de ces sessions deviennent des références prisées dans les discographies de nombreux artistes : Nirvana en 1993, Kiss en 1995, Bruce Springsteen en 1993 qui l’intitule unplugged (!), Paul McCartney en 1991, Neil Young en 1993… et donc Clapton en 1992.

© Denys Legros

L’album reste encore aujourd’hui un des plus gros succès de la carrière du chanteur-guitariste, sans doute grâce à deux singles. Outre l’émouvant Tears in heaven, ce Unplugged est surtout connu pour la version acoustique et ternaire de Layla.

Une chanson culte revisitée

Le morceau-monument sorti en 1970 sur le disque Layla and other assorted love songs de Derek and the Dominos est ici complément réarrangé. Le rock écorché et brûlant d’origine se transforme en shuffle jazzy nonchalant. Une nouvelle génération découvre ce titre par cette version qui est encore aujourd’hui souvent plus connue que l’originale. Mais on peut imaginer la sensation de surprise du public de l’émission ce 16 janvier 1992 en entendant les premières notes.

Une forte dominante blues

La formule acoustique offre l’occasion à Clapton de replonger dans ses racines blues, façon deep south delta : Hey hey et son leitmotiv obsédant, Before you accuse me qui figure en version électrique sur Journeyman, le final Rollin’ & tumblin’ joué de façon imprévue (la régie rate d’ailleurs le début de l’enregistrement, et Clapton demande à la toute fin « did you get that ? » soit « vous avez eu ça ? »), mais surtout les deux superbes performances de Walkin blues et Malted milk.

Seul en guitare-voix, en fingerpicking et slide sur Dobro, Clapton révèle ici une intensité d’interprétation digne de son idole Robert Johnson. Sur Malted Milk, le second guitariste Andy Fairweather-Low apporte un soutien discret, mais la formule reste épurée au possible.

Autre reprise d’un standard du blues : Nobody knows you when you’re down and out qui illuminait déjà Layla and other assorted love songs, est ici accéléré et prend des accents honkytonk avec son piano façon bastringue de Chuck Leavell. Un peu dans le même esprit, Alberta tire encore un peu plus vers la ballade mi-blues mi-folk-country, tandis que San Francisco bay blues donne l’occasion à Clapton de jouer du kazoo ! Une ambiance qui à chaque écoute me fait penser un peu aux Copains d’abord. Cette vidéo nous montre les deux faux-départs du morceau :

Mais aussi une légère couleur pop

Même si l’ambiance globale de l’enregistrement baigne dans un blues respectueux des références d’avant-guerre, quelques morceaux rappellent l’actualité discographique de Clapton du moment : l’instrumental Signe qui ouvre le disque ainsi que Lonely stranger sont deux inédits. Et en plus de Before you accuse me, l’album Journeyman sorti en 1989 est également représenté par Running on faith et Old love.

Sur la première chanson aux accents gospel, le guitariste choisit de privilégier la partie slide-dobro, alors qu’à l’inverse les concerts de 1990-91 ne comportaient que les arpèges éclectiques. La deuxième est indubitablement un des grands moments du concert avec un solo de piano magnifique. Fairweather-Low et Clapton ne s’y trompent pas en jetant un regard admiratif à l’encontre de Chuck Leavell (à 6:28 dans la vidéo)

Old love est la dernière chanson dans la discographie de Clapton consacrée à Patti Boyd, son amour passionnel qui lui avait inspiré son chef d’œuvre Layla. Comme une fin de cycle, et le début d’un autre. Avec cet album Unplugged, le chanteur-guitariste à la vie parsemée d’évènements dramatiques allait vivre une véritable renaissance.

Au moment de l’enregistrement ce 16 janvier 1992, il était loin de se douter que ce disque allait devenir le plus vendu de sa carrière. Un concert enregistré il y a tout juste 30 ans aujourd’hui.

© Jean-François Convert – Janvier 2022

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1 commentaire sur “Il y a 30 ans, Eric Clapton renaissait en acoustique

  1. Un monument ! Un toucher de guitare exceptionnel et un son « signature »

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