Pour célébrer la sortie de son tout premier EP en juin dernier, Hausmane a donné deux concerts aux studios Ferber.
Artiste, compositeur et producteur, Hausmane évolue depuis plusieurs années à la croisée des genres, façonnant une identité musicale singulière, influencée par la folk, la chanson, le jazz et la soul. Après avoir consacré une grande partie de son parcours à la production pour d’autres artistes (La Chica, Dwara, André Manoukian…) et pour son projet en trio, FORM, aux influences indie électronique, il a sorti en juin dernier son premier EP solo, intitulé sobrement I. Cinq titres qui misent avant tout sur l’atmosphère : sa voix qui parfois se démultiplie, des guitares qui s’enchevêtrent, des nappes de claviers planantes, une rythmique discrète., le tout pour nous plonger dans une sorte de sensation d’apesanteur et de cocooning.
La chanson qui ouvre le disque, miles away, parle de la vulnérabilité, de se laisser emporter par ce que l’histoire d’amour peut provoquer de complexe et de tumultueux, tout en ayant bien vu venir les complications. C’est l’idée de ne pas pouvoir y échapper, et même de ne pas vouloir y échapper, parce que la beauté du sentiment, avec tout ce qu’il comporte de fragile et de turbulent, mérite d’être vécue.
La suivante, new memory accélère le rythme mais reste dans le domaine de l’introspection. Huasmane explique : « Il s’agit d’un moment bien précis, juste après une rupture, ce moment où la décision de se séparer a été prise, mais où l’on reste pris dans cette « zone grise ». Une période où, malgré tout, on continue de vivre des choses qui, à la fois, nous marquent et nous échappent. Des « nouveaux souvenirs » qui, paradoxalement, sont faits pour être oubliés, mais qui s’impriment quand même.«
Hausmane a toujours eu du mal à parler, à demander de l’aide, ce qui le laisse souvent dans une solitude silencieuse. Il finit souvent par dire qu’il est juste « fatigué » ou “malade” quand ça ne va pas, pour éviter qu’on ne lui pose trop de questions. Et il se répète sans cesse que ça ira mieux demain, comme un mantra, en boucle. C’est exactement ce qu’il essaie de dire à travers under the weather.
Pour Darling, Hausmane a invité la chanteuse La Chica à lui répondre à travers une mélodie entêtante posée sur une boucle rythmique obsédante. L’histoire de ce titre est plutôt folle puisqu’elle imagine et décrit une rupture avant même qu’elle n’ait eu lieu. Et la personne concernée n’est autre que La Chica.
Pour clore le disque, dwf parle d’un « amour étrange, qui n’a plus le droit d’être, mais qui est encore là, en silence ». L’auteur ajoute : « C’est l’histoire de se retenir de retomber amoureux, tout en voulant être là pour la personne que l’on a décidé de quitter ». Ici, l’orchestration se fait foisonnante. Hausmane y invite ses musiciens à venir enregistrer pour la première fois avec lui. Il lui semblait donc tout naturel de finir l’EP avec ce morceau.
Même si cet EP est d’abord un projet solo, Hausmane a tenu à l’interpréter en live avec ses compagnons de route. Il en a résulté deux soirées magiques aux Studios Ferber, à Paris. Quinze musicien·ne·s sur scène, des invité·e·s précieux·ses, et une énergie rare. Parmi eux : La Chica, Claire Days, Coline Rio, Lilian Mille, Nizar Ali… Et tout un band au sommet, réuni pour deux concerts uniques. Deux moments suspendus, capturés avec sensibilité par Zoé Cavaro et Mickaël Mehdi Fidjili.
Thème 3 montre que la voix peut être un instrument à part entière, et nul besoin de paroles pour susciter l’émotion, un crescendo lyrique magnifique. Under the weather utilise également à merveille les harmonies vocales avec Cathy Jane et nous donne l’impression de voler. Enfin, Darling sublime le duo Hausmane /La Chica encore plus que sur la version de l’EP. La voix de la chanteuse s’envole par dessus la ritournelle rythmique entêtante.
À travers ce projet solo, Hausmane livre ses émotions et des fragments de son histoire personnelle. Pour un premier opus, il frappe fort avec un univers singulier qu’on attend de découvrir encore un peu plus. Un artiste à suivre assurément.
© Jean-François Convert – Décembre 2025
